Un jeune chrétien tunisien égorgé pour avoir quitté l'islam
L'assassinat s'est déroulé sous le son de prières rituelles a notamment été montré à la télévision égyptienne qui donne la nationalité des personnes concernées.
La révolution dite du jasmin est passée et les aspirants à la liberté auraient pu tendre un bouquet de myosotis : « Ne nous oubliez pas ! » Un jeune homme qui avait quitté l'islam pour embrasser le christianisme vient d'être décapité. L'assassinat s'est déroulé sous le son de prières rituelles a notamment été montré à la télévision égyptienne qui donne la nationalité des personnes concernées.
C'est le blog L'Observatoire de la Christianophobie tenu par le journaliste Daniel Hamiche qui relaie cette macabre information depuis le site Gatestone Institute qui situe le drame en Tunisie. Le crime a été diffusé à la télévision égyptienne au cours de l'émission « Egypt Today » qui a vu son présentateur, le libéral Tawfiq Okasha, très choqué par cette application de sa religion, et demander si c'était là l'islam. Gatestone Institute renvoie vers l'enregistrement qui, outre la mise à mort, documente sur le cérémonial religieux, et donne une description pour qui préfère éviter les images sanglantes.
Le jeune chrétien avant l'assassinat
Le jeune chrétien est encerclé d'hommes masqués, ils tirent sa tête en arrière, le tranchant de la lame d'un couteau collé à sa gorge. L'ancien musulman est calme, il ne se débat pas, il sait qu'il n'y échappera pas. Montent des prières musulmanes et des supplications, des demandes qu'Allah punisse le « mécréant » : « Qu'Allah soit vengé de l'apostat polythéiste ! » (pour l'islam, le christianisme est un polythéisme du fait de la croyance dans la Trinité), « Allah, que ta religion l'emporte sur les polythéistes ! », « Allah, vaincs les infidèles par la main des musulmans ! » et « Il n'y a pas d'autre Dieu qu'Allah et Mahomet est son messager ! » Et résonnent les « Allahu Akbar! » (Dieu est grand !) quand le bourreau commence sa sanglante besogne tandis que le jeune homme paraît murmurer une dernière prière. Au bout de presque deux minutes la décollation est achevée pour la plus grande satisfaction des islamistes.
Printemps arabe et islamisme, la terreur des libéraux et des minorités
Le Printemps arabe a été, à bien des égards, une ouverture sur une persécution accrue des chrétiens, les islamistes ont confisqué les espoirs de la jeunesse, voire son espérance. Et les chrétiens observaient la situation avec inquietude. Désormais sûrs de leur liberté, les musulmans radicaux imposent le retour à la religion dans l'espace public et menacent de plus en plus ouvertement les minorités et qui ne suivrait pas la charia, dénonçant comme blasphémateurs des intellectuels dont ils ne lisent même pas les ouvrages. Pour les islamistes, le droit musulman ne saurait être réduit au statut personnel ou ne trouver qu'une application limitée dans la sphère publique. Ennahdha, le parti majoritaire à l'Assemblée constituante, rêve d'un califat, c'est-à-dire d'un successeur du dernier des prophètes des musulmans, Mahomet, dans la direction de la cité, ce qui ferait de l'espace public un domaine entièrement soumis au religieux. Le 11 mai dernier, des salafistes ont tenté de couper la main d'un homme d'un voleur. Lors d'un discours à l'Assemblée, un député du parti, Sadok Chourou, a été remercié par le président après avoir déclaré qu' « Il faut couper les mains et les pieds des sit-inneurs et les crucifier. »
La peine de mort pour apostasie
En février de l'an passé, un prêtre polonais de 34 ans avait été égorgé dans une école privée catholique de la région de Manouba. L'assassinat d'un musulman qui apostasie l'islam n'est qu'un aboutissement logique de ce fondamentalisme, puisque le départ de la religion musulmane ne peut qu'entraîner la mise à mort selon les juristes musulmans (cf. les travaux de l'islamologue Mouna Mohammed Cherif au sujet de l'Algérie et au-delà). Les Etats musulmans adoptent différentes approches : certains ne condamnent pas l'apostat à mort et acceptent plus ou moins le départ de l'islam (ainsi l'Algérie, la Tunisie ou encore le Mali), d'autres prévoient la peine capitale, par exemple l'Arabie saoudite. Néanmoins, Mouna Mohammed Cherif fait remarquer que « Si on cherche le sujet de l'apostasie dans les références de la jurisprudence musulmane, on remarque que tous les juristes l'incluent dans les qitab hudûd [Chapitre des peines légales]. Les malikites, les hanbalites et les chaféites considèrent l'apostasie comme jinâyâ [crime d'homicide ou blessures corporelles]. Les hanafites eux, la classent dans le chapitre dujihâd [guerre], avec la rébellion. On comprend donc par ce classement que l'apostasie est considérée comme un délit ou une infraction chez tous les juristes. Ainsi, tout musulman adulte quittant volontairement et publiquement sa religion est jugé apostat. Ce jugement conduit à une sentence et à une condamnation, selon les différentes écoles juridiques. La sentence est définie par la peine de mort pour l'apostat. »
Certes, l'assassinat de ce jeune chrétien n'est pas le fait des autorités publiques, mais les islamistes s'estiment légitimes pour nettoyer la salissure que constitue selon eux une apostasie et oeuvrent avec un sentiment d'impunité. Si le précédent régime était dictatorial, l'avènement des islamistes autrefois réprimés est une cause de frustration et même de terreur pour ceux qui souhaitaient une démocratie de type libérale, comprenant le respect des opposants. La révolution du jasmin, ainsi appelée par un journaliste tunisien et par des confrères européens en quête d'un sens de l'histoire hégélien, forcément romantique en plus de tendre vers le progrès, laisse de plus en plus place à de tels drames dans un silence assez gêné de la part de ceux qui rêvaient d'un équivalent tunisien de la révolution des oeillets.
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