Il ne dit pas "Je veux me venger" mais "Je veux que ça change!"

Un texte de SEL

Le sourire aux lèvres et le regard discret, une jeune fille entre dans le bureau d'un centre d'accueil pour enfants parrainés, à Kigali, au Rwanda, et salue Dativa Muteteli.
Cette fillette, Thabitha, une survivante du génocide de 1994 a une grande cicatrice sur le front et n'a plus ni main ni poignet.

Dativa l'accueille avec une tape affectueuse sur l'épaule. Dativa est spécialiste santé à Compassion Rwanda, elle a reçu une formation dans le conseil post-traumatique.

Thabitha est l'une des quatre jeunes que Dativa rencontrera ce jour-là*. Tantôt elles se rencontrent à l'ombre d'un arbre, tantôt dans la sécurité de la maison familiale.
L'âge et les histoires varient, mais tous ont perdu des membres de leur famille dans le génocide et tous sont réconfortés par Dativa.


"J'ai vécu ce que me racontent les enfants"

Dativa, est née en Ouganda. Infirmière diplômée, elle est engagée avec Compassion Rwanda (partenaire du SEL) depuis 1988 en tant que spécialiste santé. Son amour pour les Rwandais l'a souvent protégée dans le conflit entre les Tutsis et les Hutus. Quand on me menaçait, dit-elle, il y avait toujours quelqu'un pour dire « Dativa aide nos enfants. Sa mort, c'est la mort des enfants.»

Mais le 13 avril 1994, elle s'est retrouvée à genoux, attendant la mort, avec ses trois fils et personne n'était là pour défendre sa cause. Courageusement, l'un de ses fils de 7 ans, a plaidé avec le soldat qui a finalement changé d'avis. 
Terrifiés, ils sont restés pendant trois semaines dans un abri en brique de leur propre fabrication en sortant la nuit pour manger quelques avocats et en buvant l'eau de pluie.
Finalement, ils se sont échappés en Ouganda, mais l'amour de Dativa pour le Rwanda l'a ramenée au pays en septembre 1994 en tant que conseillère spécialisée en soins post traumatiques.

Pendant 12 ans, Dativa a entendu les mêmes histoires atroces d'enfants qui ont survécu.
 

Au lieu de dire "Je veux me venger", il dit : "Je veux que ça change"

L'histoire d'Eric par exemple : il n'avait que 5 ans en 1994. Il était sur le dos de sa mère quand elle a été tuée. Il vit aujourd'hui avec son frère aîné qui n'avait que 14 ans quand il est devenu chef de famille.


Lors de sa rencontre avec lui, Dativa demande à Eric d'écrire les souvenirs qu'il avait de la mort de sa mère et du génocide. Il écrit quelques lignes puis ses pensées s'évadent. Dativa lui demande alors s'il est prêt à partager ses mots sur le papier. Il lit tout doucement les souvenirs de la mort de ses voisins, de celle de sa propre mère - et très vite il fond en larmes. Il pose alors sa tête sur l'épaule de Dativa en disant « C'est tout pour aujourd'hui ».

Elle reste un bon moment là, avec Eric en pleurs sur son épaule. Finalement, les larmes cessent de couler, mais Eric n'est pas pressé de partir.
Puis les deux commencent à parler d'avenir. Eric a des projets pour devenir un « leader » - même un président !
Quand Dativa lui demande doucement de lui en dire davantage, il dit « Je veux éliminer le passé pour que personne ne vive une vie comme la mienne ».

En méditant un peu plus tard sur le cas d'Eric, elle confie : " Eric est l'exemple parfait. Malgré le fait qu'il ait vu sa mère se faire tuer, l'ambition d'Eric est d'être un leader. Un bon chef qui veut oublier le passé. Au lieu de dire « je veux me venger", il dit "Je veux que ça change."
 

Comment ne pas avoir d'espoir avec un garçon comme lui. C'est un vrai héros !


* Ce récit a été écrit en 2008 -  Au cours des 20 dernières années, Compassion Rwanda a  accompagné beaucoup d'enfants, commeTabitha ou Eric, sur le chemin du pardon.
D'après un récit de Phaebe Rogers - écrit en 2008 - Compassion.

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Pasteur
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