S'intégrer dans l'église lorsqu'on vient d'ailleurs !
Il y a parfois des chocs de part et d'autre lorsqu' un immigré essaie de s'intégrer dans une église en Europe. Dans cet article, Telesphore ONDO, un étudiant du Gabon travaillant pour son doctorat à Reims à l'époque, explore les difficultés mais aussi le merveilleux potentiel de cette intégration.
Voila ce qui arrive parfois : une soeur venant des îles est allée au culte dans une église composée en majorité d'Européens pour la première fois de sa vie. Lorsque le chantre a entonné le célèbre cantique « Dieu est bon », la soeur s'est mise debout, les yeux fermés, pour danser, sauter, crier de joie. Elle a gardé pratiquement le même rythme pour tous les autres chants. En ouvrant les yeux, elle s'est rendue compte qu'en fait, elle était la seule à être « bouillante » pour le Seigneur.
Pendant la prédication, lorsque le Pasteur citait, avec assurance et autorité, les promesses du Seigneur, elle criait très fort :« Alléluia ! Amen », « gloire à Jésus. »
A la fin du culte, elle s'est aperçue, une fois de plus, qu'elle était la seule à être zélée à l'église ce jour-là. Alors qu'elle franchissait la porte de l'église pour rentrer chez elle, un ancien est venu lui dire de se calmer car elle « dérangeait » tout le monde. Et la soeur de lui répondre : « En fait, je crois plutôt que c'est un peu mort chez vous. »
Il est parfois difficile de s'intégrer dans une église composée de personnes d'une culture différente de la sienne.
Dans l'Eglise des îles et la plupart des Eglises africaines, les chrétiens expriment, de façon plus « bouillante », avec leur bouche et leur corps, leur reconnaissance au Seigneur. Du point de vue biblique, la soeur ne péchait pas en s'exprimant de la sorte ; mais dans ses rapports avec les autres, elle « dérangeait » certainement les chrétiens non habitués aux tempéraments bouillants.
Concrètement, pour s'intégrer assez facilement ou être accepté dans une église européenne comme ailleurs, il faut que le chrétien immigré ait beaucoup d'amour, de patience et de sagesse. Toutes les Eglises ne se ressemblent pas et tous les peuples n'expriment pas leur foi de la même manière. Chaque peuple- mieux chaque individu- exprime sa foi à sa manière mais dans tous les cas, l'expression de la foi doit être sainte, pure.
Lorsque le chrétien des îles ou d'Afrique est membre d'une église européenne, il doit prendre en compte ces différents éléments. Plus précisément, il doit être plein d'amour et essayer de s'adapter à son nouveau milieu afin de ne pas être une occasion de chute pour les autres.
Mais, il ne doit pas s'aliéner ou faire disparaître ce qu'il est, sa personnalité. Dieu aime la pluralité culturelle car elle est une richesse pour l'église. Il faut cependant que chaque peuple, chaque culture trouve un cadre précis à l'église, dans lequel il pourra s'exprimer sans pour autant faire de l'église un regroupement de plusieurs « portions » ou sous-groupes culturels. Il sera bénéfique qu'il y ait une interaction entre les différentes cultures, les différents peuples qui composent l'église.
Le nouveau chrétien dans l'église doit aussi être tolérant et patient. Parfois, on peut être mal reçu le premier jour et être bien accueilli quelques semaines après. Certaines personnes n'ont plus jamais mis les pieds dans une église parce que le premier jour, elles n'ont pas été bien reçues ni même saluées. Alors, elles se sont empressées de dire : « Il n'y a pas d'amour dans cette église. »
Par ailleurs, pour mieux s'intégrer, le chrétien immigré doit assister aux réunions de l'église même s'il n'exerce pas dès le départ une activité, ce qui est tout à fait normal.
Mais, l'accueil ?
Mais il n'y a pas que le frère ou la soeur immigré(e) qui doive faire des efforts. En effet, le premier jour est toujours déterminant, un peu comme pour les rendez-vous d'embauche. Lorsque le nouveau est bien accueilli, il aura bien plus envie de revenir la prochaine fois. Je me souviens d'un frère qui, le jour de mon premier culte dans une église européenne, m'avait serré dans ses bras alors que je lui tendais la main. Je ne pourrai jamais l'oublier.
Il faut donc tout faire pour que le nouveau soit bien reçu. S'il n'est pas bien accueilli, il aura certainement du mal à revenir ou à être assidu aux réunions. Peut-être faut-il que chaque église mette en place une structure d'accueil des nouveaux afin de faciliter leur intégration.
Par ailleurs, l'Eglise doit faire un effort pour accepter le « melting-pot. » Dieu ne fait aucun cas de la couleur de notre peau. Ce qui compte, c'est le coeur. L'Eglise doit accepter, sans aucune distinction, tous les peuples en son sein. Et elle doit le prouver.
Dans le monde, malgré les discours politiques et même religieux relatifs à l'égalité des races, l'Africain en général jouit, en pratique, d'un statut inférieur, minoré. Mieux, il semble même que tout ce qui est africain soit mauvais, en général. Ces considérations « mondaines » ne doivent pas exister dans l'Eglise de Dieu. En Christ, il ne doit pas y avoir de racisme. Si dans le monde, l'homme ou la femme de couleur est en permanence meurtri(e), blessé(e), méprisé(e), humilié(e), dans l'Eglise il ou elle doit être considéré(e) comme une créature du Seigneur au même titre que tout le monde, et mieux, comme un bien-aimé dans le Seigneur. Son statut doit être valorisé.
Le chrétien européen doit être le moteur, l'instrument de l'intégration de l'immigré dans l'Eglise. Je bénis Dieu, parce que dans mon église, ce sont des merveilleux chrétiens de ce « type » qui m'ont entourés.
Mais ce que le chrétien européen doit aussi éviter, notamment les responsables, c'est la censure systématique. Dans l'histoire citée précédemment, l'ancien n'a pas hésité à venir dire à la soeur qu'elle « dérangeait » tout le monde. La Bible nous demande de redresser avec amour et sagesse pour gagner le frère ou la soeur.
On le voit, l'intégration de l'immigré dans l'Eglise nécessite l'amour, la patience et la tolérance de part et d'autre. Et lorsque cette intégration réussit par la puissance du Saint-Esprit, elle crée une dynamique nouvelle dans l'Eglise et devient, entre les mains du Seigneur, une véritable « bombe atomique » qui fera avancer le royaume de Dieu.