Faire un don en pensant réductions d'impôts ?
En France, la plupart des associations sociales et humanitaires fournissent à leurs donateurs un reçu fiscal leur permettant d'obtenir une réduction d'impôt. Certaines personnes choisissent de faire un don parce qu'elles savent qu'elles bénéficieront de cette réduction.
Est-ce immoral ? Est-ce une façon intéressée de donner qui ôte sa valeur au don ?
Est-ce que la vraie générosité ne consiste pas à donner sans aucune arrière-pensée ?
Je répondrai de façon très nette à ce genre de questions : je ne trouve rien d'immoral au fait d'utiliser la possibilité qui nous est accordée de bénéficier de réductions d'impôt grâce à un don, ni même de faire un don dans le but de bénéficier d'une telle réduction.
Essayons d'en discuter.
Où est la générosité quand on donne pour bénéficier d'une réduction d'impôt ?
C'est vrai, il n'y a rien de généreux dans le fait de donner d'une main quand de l'autre on économise en échange : c'est de l'argent dont on était obligé de se séparer de toute façon !
Mais là n'est pas la question : il ne s'agit pas de savoir s'il est généreux de donner pour bénéficier d'une réduction d'impôt, mais de savoir si c'est immoral ou cynique.
Ça ne l'est pas.
Il s'agit d'un choix : le choix d'affecter une partie de son argent à une association ou à une oeuvre à laquelle on croit plutôt qu'au budget de l'État.
Si c'est l'État lui-même qui nous donne cette possibilité, pourquoi s'en priver ?
Et il convient ensuite de noter que la réduction d'impôt que l'on peut obtenir est plus faible que le montant du don.
Par exemple, si vous donnez 100 euros à une association, vous pouvez payer 66 euros d'impôt en moins. Les 34 euros restant sont de votre poche.
Et c'est là que se trouve la générosité. Celui qui fait un don pour bénéficier d'une réduction d'impôt « dépense » toujours plus d'argent que s'il payait tous ses impôts et ne faisait aucun don !
L'État est dans son rôle en proposant ce type d'incitations fiscales à la générosité
La Bible dit que les gouvernants sont envoyés par Dieu pour « louer ceux qui font le bien » (1 Pierre 2.14), autrement dit pour encourager la pratique du bien.
En permettant à ceux qui donnent aux associations humanitaires de bénéficier d'une réduction d'impôt, l'État encourage ces associations sans intervenir directement dans leurs affaires.
Mais un chrétien peut-il utiliser son reçu fiscal ? N'est-ce pas contraire à l'enseignement de Jésus sur l'aumône ?
Dans l'Évangile selon Matthieu, Jésus dit :
« Quand donc tu fais l'aumône, ne sonne pas de la trompette devant toi, comme font les hypocrites dans les synagogues et dans les rues, afin d'être glorifiés par les hommes. En vérité je vous le dis, ils ont reçu leur récompense. Mais quand tu fais l'aumône, que ta main gauche ne sache pas ce que fait ta main droite, afin que ton aumône se fasse en secret, et ton Père, qui voit dans le secret, te le rendra. » (6.2-4)
Est-ce que « déclarer » ce que l'on a donné ne va pas à l'encontre de la discrétion que Jésus nous demande dans ce passage ?
Dans ce texte Jésus parle de personnes qui recherchaient de la gloire de la part des hommes en se mettant en avant lorsqu'elles donnaient :
- Soit dans un contexte religieux (dans la synagogue)
- Soit dans la société en général (dans les rues)
Leur don était une manière d'acheter la reconnaissance et l'admiration des autres. Ces gens donnaient parce qu'ils voulaient que tout le monde pense du bien d'eux.
Cela n'a rien à voir avec la manière dont les dons sont déclarés à l'administration fiscale où les personnes qui enregistrent votre déclaration et vos reçus fiscaux ne vous connaissent pas et ne vous enverront jamais le moindre signe d'admiration pour qui vous êtes et ce que vous faites.
Le traitement des dons par les associations et par les administrations se fait de façon discrète et ne pose aucun problème par rapport au texte de l'Évangile.
La possibilité de bénéficier de réductions d'impôt en raison des dons que l'on fait devrait être perçue par tout un chacun comme une incitation à la générosité.
Pourquoi pas comme la possibilité de donner encore plus ?
Un texte de Daniel Hillion