Coran versus Bible: J'ai cherché
MON ENFANCE ET MES ÉTUDES
Je suis né en Afghanistan en 1881. Mon père, Payanda Khan,habitait Logar, à environ 75 km au sud de la ville de Kaboul. Il était colonel dans l'armée afghane, et portait le titre de Bahadur Khan. Tout le pays connaissait le colonel Bahadur Khan. Il avait deux épouses. La première était une proche parente qui lui avait donné trois filles, mais pas de fils. Donc, pour ne pas laisser sa famille sans descendance mâle, il a épousé la fille de Sayyid Mahmud Aqa, qui était membre d'une des plus nobles et célèbres familles d'Afghanistan. Mon jeune frère, Taj Muhammad Khan, et moi étions le fruit de ce mariage.
Peu après son arrivée de Russie pour accéder au trône de Kaboul, l'émir Abdur Rahman Khan a fait arrêter six des plus éminentes personnalités du pays pour les envoyer dans un lieu inconnu. Mon père faisait partie de ce groupe. Plus tard, elles ont été toutes exécutées. Puis, une deuxième tragédie a touché notre famille. Pour des raisons politiques, mes deux oncles maternels étaient arrêtés et enfermés dans la prison d'état de Kaboul pour être ensuite exilés en Inde. Mon troisième oncle maternel, avec la permission de l'émir, a pu quitter l'Afghanistan avec sa mère et ses serviteurs pour s'installer en Inde. Le reste de notre famille restait à Kaboul.
En Inde, ils se sont installés dans la ville de Hasan Abdal. A la suite d'autres difficultés politiques, toute notre famille a dû quitter Kaboul pour se rendre à Hasan Abdal. Quelques mois plus tard, ma mère est décédée. Suite à une réconciliation avec l'émir Abdul Rahman Khan, ma famille a pu revenir en Afghanistan, à l'exception de mes trois oncles et de moi-même.
Je suis arrivé plus tard à Delhi, pour entrer au Madrasa-i-Fatehpuri, afin de me perfectionner dans l'étude de l'arabe. A cette époque, l'école était dirigée par l'imam Abdul Jalil; le sous-directeur était Fateh Muhammad Khan. Ces deux hommes sympathiques m'ont aidé à terminer mes études de logique et à poursuivre celles des Hadiths et Commentaires. Pendant la journée, j'étudiais avec mes camarades de classe. Le soir, je prenais des leçons particulières avec Abdul Jalil. C'est ainsi que par la grâce de Dieu, j'ai pu me spécialiser aussi dans ces matières.
PREMIÈRE RENCONTRE AVEC DES CHRÉTIENS
Un jour, en rentrant d'une promenade avec quelques amis, nous avons vu une grande foule, non loin de notre école. En arrivant sur les lieux, nous avons écouté une discussion entre un prédicateur chrétien et un élève de notre école sur la doctrine de la Trinité. Le premier s'appuyait sur la doctrine dans ce verset du Coran:
"Nous sommes plus près de lui que la veine de son cou."(Sourate Qaf 50.16)
(Les références coraniques sont tirées du Coran, traduit par D. Masson et revu par le Dr Sobhi El-Saleh, éditions Gallimard, 1967. )
Il soutenait qu'ici, nahnu, la première personne du pluriel est utilisée, et que si l'unité de Dieu était absolue, la première personne du singulier, ana, devrait être employée. Comme l'étudiant répondait mais en s'écartant du sujet, mes amis m'ont poussé à répondre au prédicateur. Je me suis donc avancé, et j'ai déclaré que la première personne du pluriel est utilisée selon l'usage idiomatique arabe sur un plan honorifique, sans indiquer le pluriel.
C'était la première fois que j'ai discuté avec un chrétien. Ce jour-là est né en moi un désir profond de discuter avec des chrétiens, un désir qui venait d'une ferveur enracinée pour les choses sacrées. Par la suite, et chaque fois que cela m'était possible, j'ai commencé à rechercher des livres qui attaquaient le Christianisme. J'ai fait une étude attentive de ces écrits, et certains jours précis, je me rendais à la place publique tout près de notre école pour discuter avec des prédicateurs chrétiens.
Un jour, un pasteur anglais qui avait l'habitude d'accompagner les prédicateurs, m'a donné sa carte en m'invitant à lui rendre visite. Il a été assez aimable pour me dire d'amener des amis si je voulais. C'est ainsi qu'avec deux ou trois amis, je suis allé le voir. C'était un homme accueillant et sympathique. Il nous a offert du thé, et nous avons commencé à discuter de la religion. Se tournant vers moi, il m'a demandé: "Est-ce que vous lisez la Bible?" "Pourquoi devrais-je lire la Bible, ai-je répondu? Qui veut lire un livre modifié sans cesse?" A ces mots, le visage de cet homme a changé; il paraissait navré de mes paroles. Enfin, avec un demi-sourire il a dit: "Pensez-vous que tous les chrétiens sont des malhonnêtes? Croyez-vous que notre crainte de Dieu est si faible que nous trompons les gens en apportant des changements aux Saintes Écritures? Quand les musulmans disent que les chrétiens continuent à modifier le texte de la Torah et de l'Injil (l'Évangile), ils pensent que tous les chrétiens sont malhonnêtes, qu'ils trompent leur prochain. C'est là une grave accusation, totalement injustifiée. Les chrétiens croient que la Bible est la Parole de Dieu, comme les musulmans croient au Coran. Ainsi, si aucun musulman n'a le droit de changer le texte du Coran, comment un chrétien pourrait-il changer le texte du Livre de notre Dieu plein de sagesse, de la Sainte Bible? Si un musulman malveillant avait changé le texte d'un verset du Coran, tous les autres musulmans ne verraient-ils pas en lui quelqu'un qui s'est ouvertement écarté de l'Islam, et ne publieraient-ils pas quelques déclarations à son sujet? De la même manière, si un chrétien mal intentionné cherchait à changer un verset des Écritures, les autres chrétiens ne le considéreraient-ils pas comme en-dehors de leur religion, et ne feraient-ils pas connaître leur point de vue à son sujet? Bien sûr. Vous voyez ainsi que l'argument des musulmans, selon lequel le texte de la Parole de Dieu a été changée, est sans aucun fondement. Je crois que cela provient des musulmans plutôt ignorants de la Bible, de la foi et des doctrines chrétiennes."
Ensuite, ce pasteur m'a remis deux Bibles, une en arabe et l'autre en persan. Il m'a vivement encouragé à les lire. Nous l'avons remercié, et sommes partis. L'objectif de ce pasteur ne m'intéressait pas quant au don qu'il m'avait fait. Ce qui m'intéressait dans la lecture de la Bible était d'y trouver des erreurs, et de prouver par là que l'Islam était la vérité, en réduisant les chrétiens au silence dans toute discussion. D'ailleurs, je n'ai pas pris la peine de lire la Bible d'un bout à l'autre. J'ai seulement cherché ces passages que les musulmans citent dans leurs controverses. En bref, pendant mon séjour à Delhi, je me suis consacré à mener une controverse avec les chrétiens.
D'AUTRES ÉTUDES
En ce temps-là, j'ai décidé de me rendre à Bombay. J'ai eu la chance, en arrivant, de rencontrer l'imam Hidayat Ullahqui était un homme d'autorité et un grand penseur, très respecté dans la région. Il était de Kaboul et connaissait bien ma famille. Dès que nous avons appris à nous connaître, il m'a promis son aide pour parfaire mon instruction. Il pensait que mes études étaient presque terminées, et m'a conseillé de m'attacher désormais aux études littéraires. Il m'a autorisé à me servir de sa remarquable bibliothèque. J'ai donc commencé ces nouvelles études sous sa direction. Comme il avait passé la plupart de sa vie à Constantinople, en Égypte et en Arabie, il était expert sur le sujet. Son enseignement en langue persane, notre langue maternelle à tous deux, a bien facilité la tâche.
A ce moment, un autre expert en logique et philosophie est arrivé d'Égypte pour occuper un poste de professeur au Madrasa-i-Zakariyya. Cet homme était l'imam Abdul Ahad qui était du district de Djalalabad en Afghanistan. Comme on me parlait de sa célébrité, je suis entré au Madrasa-i-Zakariyya pour y étudier les derniers livres en matière de logique et de philosophie. L'imam m'a traité comme un fils, en m'octroyant une pièce à côté de la sienne, afin que je puisse le consulter quand j'en avais besoin.
D'AUTRES DISCUSSIONS AVEC LES CHRÉTIENS
Un jour, au cours d'une promenade avec quelques camarades de notre école, nous sommes arrivés à Dhobi Talab. Là, nous avons vu des prédicateurs chrétiens parler aux gens. Immédiatement, mon hostilité du passé s'est réveillée en pensant à mes expériences vécues à Delhi. J'avançais vers les prédicateurs quand un camarade m'a arrêté par ces paroles: "Imam Sahib, ne t'occupe pas de ces gens, car discuter avec eux serait du temps perdu. Ces pauvres camarades ne savent pas comment mener une discussion, ni les règles d'un débat. Ils sont payés pour faire ce travail, et ils sont en train de remplir leur devoir, donc ce n'est pas la peine de discuter avec eux." J'ai répondu:"Je sais tout sur ces gens. Ils ne connaissent ni l'art ni les règles du débat certes, mais ils savent certainement égarer les gens en leur enseignant la fausseté. Il est de la responsabilité de tout bon musulman de sauver ses frères mal avisés de leur machination." Je me suis avancé, et j'ai commencé à leur lancer un lot d'objections. Ils ripostaient aussi par des rafales d'objections à mes objections.
Finalement, la discussion a été abrégée par manque de temps. La nouvelle de notre rencontre s'est vite répandue parmi les étudiants de l'école. Ils ont été eux aussi animés du zèle de s'engager dans la discussion. Nous allions régulièrement deux fois par semaine discuter avec les chrétiens. Éventuellement, deux missionnaires nous ont invités chez eux avec l'accord de leur chef catéchiste, Mr Joseph Bihari. Pendant que nous y étions, ils nous ont suggéré l'ouverture d'une salle de lecture près de notre école si nous voulions sincèrement découvrir la vérité sur le Christianisme. Ceci pourrait nous permettre de continuer notre investigation au moins une fois par semaine, puisque Dhobi Talab était trop éloigné. J'ai accepté avec reconnaissance cette offre. Lorsque la salle de lecture était ouverte, nous y tenions notre réunion selon un programme défini. Ayant constaté que les étudiants et mes autres camarades ne savaient rien sur le Christianisme et n'étaient pas expérimentés dans les débats, j'ai loué une autre maison sur le conseil de l'imam Abbas Khan Sahib. Nous avons formé un groupe appelé: "Nadwatul Mutakallimin".Le but de ce groupe était de préparer ou former des controversistes contre toute religion non islamique et en particulier le Christianisme.
Quand mon professeur a constaté que j'étais toujours préoccupé par les débats et que je ne m'intéressais à rien d'autre, il est venu dans ma chambre un jour après la prière du soir. A ce moment je lisais l'Injil (le Nouveau Testament), et il m'a demandé ce que je lisais. Je lui ai répondu: "l'Injil". Avec colère, il m'a repris en ces termes: "Je crains que tu ne deviennes chrétien."J'ai été très choqué par sa réplique. Quoique je n'aie pas voulu lui manquer de respect, j'ai été obligé de lui répondre: "Pourquoi deviendrais-je chrétien? La simple lecture de l'Injil rend-elle l'homme chrétien? Je lis pour mieux combattre et détruire le Christianisme jusqu'à ses racines, et non pour devenir chrétien. Tu devrais plutôt m'encourager, au lieu de me faire des reproches." Il m'a répondu:" Je dis cela parce que j'ai appris que celui qui lit l'Injil devient chrétien. Ne te souviens-tu pas de ce qu'a dit un certain poète? Quand un fidèle musulman lit l'Injil, son coeur se détourne de l'Islam." "Cette information n'est pas juste," ai-je répondu.
Après m'avoir donné d'autres conseils, l'imam est retourné dans sa chambre.
VOYAGE ALLER RETOUR EN ARABIE
Ce conflit religieux s'est poursuivi pendant quelques années quand, soudain, j'ai eu l'ardent désir de faire le pèlerinage à La Mecque. Immédiatement, je me suis préparé pour ce voyage, et je me suis embarqué sur le bateau Shah-i-Nurpour Jeddah, et de là, je suis allé à La Mecque.
Le jour du pèlerinage, j'ai revêtu le vêtement de circonstance pour me rendre à Arafat. C'est ce jour-là que j'ai découvert quelque chose de merveilleux: les riches et les pauvres, les haut-placés et les classes inférieures, tous portaient le même vêtement blanc. C'était comme si tous les morts étaient sortis du tombeau pour rendre compte à Dieu de leurs oeuvres. Cette vue m'a fait monter les larmes aux yeux. Mais en même temps, une pensée m'a traversé l'esprit: Si l'Islam n'est pas la seule religion vraie, qu'en sera-t-il de moi au jour de la résurrection? C'est alors que j'ai prié:
"O Dieu, montre-moi la vraie religion, la bonne voie. Si l'Islam est la vraie religion, que j'y reste fidèle. Fais-moi la grâce de réduire au silence toute opposition. Si le Christianisme est la vraie religion, révèle-moi la vérité. Amen."
Après une courte visite à Médine, je suis revenu à Bombay. Pendant mon absence, le Nadwatul Mutakallimin avait cessé de tenir ses réunions. J'ai alors organisé une autre société. J'en suis devenu le président, et Abdur Rauf le secrétaire-général. C'est chez lui que nous nous réunissions. Une de nos règles était qu'une fois par semaine, on invitait un non-musulman à prendre la parole, et l'un de nos membres pouvait lancer une controverse. Munshi Mansur Masih venait ainsi régulièrement au nom des chrétiens. D'autres venaient prendre la parole pour d'autres religions.
UN DÉNOUEMENT VITAL
Un jour, Munshi Mansur Masih a déclaré avec une grande conviction qu'il n'y avait pas de salut dans l'Islam. Les membres de notre société m'ont demandé de lui répondre. J'ai essayé de toutes mes forces de prouver qu'il y a un salut assuré et parfait dans l'Islam. L'auditoire a apprécié mes arguments. Et pourtant, je savais bien qu'au fond de moi-même, je n'avais pas la certitude de ce que j'avançais. Même en parlant, j'ai dû admettre la faiblesse de ma position. Bien que je me manifestais avec force et éclat, la voix de mon interlocuteur criait dans mon âme avec une force indescriptible.
Il était presque onze heures du soir lorsque cette discussion a pris fin. Je suis rentré chez moi, et me suis mis à réfléchir à tout ce que Munshi Mansur Masih avait dit. Plus je réfléchissais, plus il me semblait évident que le salut est le souffle même de la religion et son fondement indispensable. Sans lui, une religion n'est pas une religion.
De plus, je pensais que tout le monde était bien d'accord que l'homme est un paquet d'oublis, de désobéissances, de péchés. Sa vie n'est jamais assez pure pour être libérée des marques du péché. Le péché est devenu la seconde nature de l'homme. La question est de savoir comment on peut échapper aux comptes que l'on doit rendre, et au châtiment. Comment être sauvé? Que dit l'Islam à ce sujet? Quel est le message du Christianisme? Mon devoir était d'étudier ce sujet si important avec honnêteté et sans préjugés. Si je découvrais que le salut peut s'obtenir par l'Islam, je remercierais Dieu! Combien mes yeux brilleraient, combien mon coeur serait dans la joie! Sinon, je devais chercher cette religion qui offre un plan satisfaisant pour le salut. Devant cette décision à prendre, je suis tombé à genoux dans la prière devant Dieu. J'ai pleuré amèrement, en admettant que désormais je ne lirais pas la Bible comme je l'avais fait jusqu'à présent. Je la lirais afin de découvrir, moi, pauvre pécheur, le chemin du salut.
MA RECHERCHE DU SALUT
C'est ainsi qu'à partir de ce jour, mon attitude a changé. Je suis devenu un véritable chercheur de la vérité. J'ai commencé à lire avec attention la Bible, et à la comparer au Coran. Pour garder mon esprit en paix, j'ai emprunté un exemplaire de l'Avesta, le livre saint de la religion zoroastrienne, et j'ai acheté le Satyarth Prakash, un des saints livres de l'hindouisme. Mais après avoir bien étudié ces deux livres, j'ai conclu que le pardon des péchés, et donc le salut, ne se trouvent pas dans ces deux religions.
La plus lourde tâche restait devant moi: celle d'une étude approfondie du Coran et des meilleures des Hadiths. Avant de commencer ma recherche de la doctrine du salut dans ces oeuvres, j'ai levé mes mains vers Dieu dans la prière: "O Dieu, tu sais ce que je suis. Je suis né musulman, et mes ancêtres à chaque génération sont nés aussi dans cette religion. Ils sont morts dans la même foi. J'ai fait mes études, j'ai été élevé dans cette religion. Maintenant, ôte tout obstacle qui pourrait m'entraver dans mes découvertes de ta voie. Montre-moi le chemin du salut, de ton salut, afin que, lorsque je quitterai ce monde transitoire, je te sois agréable. Amen. "
Ce que j'ai trouvé dans mon étude du Coran a été ce que j'avais toujours connu: que le salut ne s'obtient que par les bonnes oeuvres: J'ai trouvé de nombreux versets qui présentent cette doctrine. Je n'en mentionne que deux ici:
"Ceux qui croient et qui accomplissent des oeuvres bonnes auront les Jardins du Refuge comme lieu de séjour pour prix de leurs actions. Quant aux pervers, ils auront le Feu comme refuge. Chaque fois qu'ils voudront en sortir, ils y seront ramenés et on leur dira: Goûtez ce châtiment du Feu que vous traitiez de mensonge" (Sourate La Prosternation 32.19,20).
"Celui qui aura fait le poids d'un atome de bien, le verra; celui qui aura fait le poids d'un atome de mal, le verra" (Sourate Le Tremblement de Terre 99.7,8).
A première vue, ces versets sont très beaux et offrent des consolations, mais ils ont soulevé une question dans mon esprit:"Est-il possible de faire seulement le bien et non le mal? Est- ce dans le pouvoir de l'homme?" En réfléchissant à cela, et en même temps tenant compte des capacités et passions des hommes, j'ai compris que rester sans péché est impossible. L'homme n'a jamais le pouvoir de faire sans cesse le bien, et le bien seulement.
Les philosophes d'Arabie ont déclaré que l'homme a quatre facultés pour le faire passer à l'action. Parmi ces quatre, trois, particulièrement fortes, s'opposent à l'intérêt spirituel de l'homme. Il n'y en a qu'une, une faculté angélique, qui pousse l'homme vers Dieu, qui l'aide à obéir aux commandements divins. Mais ses résultats sont cachés aux yeux de l'homme. D'autre côté, il y a la force combinée des trois autres facultés, dont les résultats sont tels que l'homme les aime tout de suite. Ainsi, comme l'homme ne voit que ce qui est à la surface et se soucie seulement du présent, il s'attache surtout aux choses du monde, il oublie facilement les choses de l'Esprit et de Dieu. Un musulman bien connu a déclaré un jour à ce sujet:
"Je suis pris au piège par quatre choses, dont l'influence cause ma misère et mes souffrances. Ces quatre choses sont Satan, le monde, la convoitise, la méchanceté. Comment me débarrasser de ces forces alors qu'elles sont mes ennemies? Le mal veut me séduire et me jeter dans le gouffre obscur de la sensualité et du plaisir."
Les trois facultés ont dominé la faculté angélique, et Adam a fait ce que Dieu lui avait défendu de faire. Le résultat a été hérité par ses descendants jusqu'à nos jours. Un Hadith raconte:
"Selon Abu Huraira, l'Apôtre de Dieu a dit: Quand Dieu a créé Adam, il lui a frappé le dos et il en est tombé tous les hommes qu'il créait depuis ses descendants jusqu'au jour de la Résurrection. Dieu a mis devant chaque homme un éclair de lumière. Adam a vu alors un homme parmi le groupe dont l'éclair de lumière l'a étonné. Il a demandé: Mon Seigneur, qui est celui-là? Dieu a répondu: David. Alors Adam a dit: Seigneur, à combien s'étend sa vie? Il a répondu: soixante ans. Adam a dit: Mon Seigneur, augmente-la de quarante ans en les prenant sur ma vie. L'Apôtre de Dieu a dit: Lorsqu'il ne restait que 40 ans à la vie d'Adam, l'ange de la mort lui est apparu. Et Adam lui a dit: N'y-a-t-il pas encore quarante ans de ma vie qui restent? Il a répondu: Ne les as-tu pas donnés à ton fils David? Alors Adam a nié l'avoir fait et ses descendants ont nié aussi, et Adam a oublié, et a mangé de l'arbre, et ses descendants ont oublié, et Adam a péché ainsi que ses descendants"(Tirmidhi).
Cet Hadith nous dit que tous les enfants d'Adam sont des pécheurs sans manquer, parce que le péché d'Adam les a atteints. C'est ainsi que des saints célèbres et des responsables religieux ont confessé leurs péchés. Adam, le premier de tous les prophètes, et sa femme, Eve, ont dit:
"Notre Seigneur! Nous nous sommes lésés nous-mêmes. Si tu ne nous pardonnes pas, et si tu ne nous fais pas miséricorde, nous serons au nombre des perdants" (Sourate Al-Araf 7.23).
Le prophète Abraham dit de même:
"Notre Seigneur! Accorde ton pardon à moi-même, à mes parents et aux croyants le Jour où apparaîtra le compte final" (Sourate Abraham 14.41).
Le Prophète de l'Islam a fait lui-même cette prière:
"O Dieu, lave mes iniquités avec l'eau qui vient de la neige"(Bukhari).
Abu Bakr, le premier Calife de l'Islam dit dans son célèbre poème:
"O Dieu, comment serai-je sauvé, car il n'y a aucun bien en moi? Je suis écrasé par mes iniquités alors que je veux le bien."
Le Coran lui-même considère que tous les hommes sont pécheurs:
"Oui, l'homme est ingrat envers son Seigneur: il est témoin de tout cela mais son amour des richesses est plus fort" (Sourate Les Chevaux 100.6,7).
J'ai pensé alors à ce sujet: Le prophète Jésus est aussi un homme. Le Coran parle des péchés des autres prophètes. Mais pourquoi le Coran ne parle-t-il pas du péché de Jésus?
"(L'ange Gabriel) dit: "Je ne suis que l'envoyé de ton Seigneur pour te donner un garçon pur" (Sourate Marie 19.19).
Comme le Coran fait état de Jésus sans péché, je me suis tourné vers l'Injil (le Nouveau Testament). J'ai trouvé alors les passages suivants:
"Qui de vous me convaincra de péché?" (Jean 8.46);
"Celui qui n'a point connu le péché, il l'a fait devenir péché pour nous afin que nous devenions en lui justice de Dieu." (2 Corinthiens 5.21);
"Car nous n'avons pas un souverain sacrificateur qui ne puisse compatir à nos faiblesses; au contraire, il a été tenté comme nous en toutes choses, sans commettre de péché."(Hébreux 4.15);
"Lui qui n'a point commis de péché, et dans la bouche duquel il ne s'est point trouvé de fraude..." (1 Pierre 2.22);
"Or, vous le savez, Jésus a paru pour ôter les péchés, et il n'y a point en lui de péché." (1 Jean 3.5)
Ainsi, nous avons de solides preuves pour attester qu'à l'exception du prophète Jésus, tous les hommes sont pécheurs. Dans de telles circonstances, qui suis-je pour m'imaginer que je vais obtenir le salut par de bonnes oeuvres, alors que de nombreux responsables religieux, des philosophes et des saints n'y sont pas arrivés?
J'ai de nouveau ouvert le Coran, pour étudier son enseignement sur la doctrine du salut par les oeuvres. Je cite deux versets seulement qui montrent clairement qu'aucun être humain, quel qu'il soit, ne peut échapper à la perdition:
"Il n'y a personne de vous qui n'y sera précipité: c'est un arrêt décidé par ton Seigneur. Nous sauverons ensuite ceux qui craignaient Dieu et nous y laisserons les injustes agenouillés"(Sourate Marie 19.71,72).
Personne ne peut savoir quelle déception, quelle terreur, quelle stupéfaction, j'ai éprouvé en lisant ces paroles. Moi, un homme spirituellement malade, je lisais le Coran comme on irait consulter un médecin, afin qu'il me donne des remèdes pour mon état de péché. Au lieu de me donner ces remèdes, il m'a dit: "Vous irez tous vers la perdition, car c'est voulu du Seigneur sans manquer."
Mon amour naturel et mon attachement à la foi islamique m'interdisaient de suivre Jésus avec précipitation. Je me suis mis à chercher un commentaire sur ce verset dans les Hadiths, pour voir ce que le Prophète de l'Islam pensait à ce sujet. Après une longue étude, j'ai trouvé le Hadith suivant dans la Mishkat:
Ibn Masud a dit que le Prophète de l'Islam avait ainsi parlé: Tous les hommes iront en enfer. Puis ils en sortiront selon leurs oeuvres. Ceux qui en sortiront en premier le feront comme l'éclair, ensuite les autres comme un grand vent, les autres comme un cheval au galop, puis comme un coureur rapide, ensuite comme un homme qui se hâte, enfin comme un homme qui marche" (Tirmidhi et Darimi).
Le sens du verset était clair à présent. Il est inévitable que tout homme doit d'abord aller en enfer, puis en sortir selon ses oeuvres. Bien que la signification du Coran soit claire et que le prophète de l'Islam s'y attache, et bien que, selon mon désir, je puisse mettre fin à mes recherches, j'ai jugé préférable de chercher le sens de cet hadith dans le Coran lui-même. Et voici, après une longue étude, le verset que j'ai trouvé:
"Si ton Seigneur l'avait voulu, il aurait rassemblé tous les hommes en une seule communauté, mais ils ne cessent pas de se dresser les uns contre les autres, à l'exception de ceux auxquels ton Seigneur a fait miséricorde et c'est pour cela qu'il les a créés. La Parole de ton Seigneur s'accomplit: Je remplirai certainement la Géhenne (l'enfer) de Djinns et d'hommes réunis" (Sourate Houd 11.118,119).
J'ai été tellement frappé par ce verset que j'ai fermé lentement le Coran pour me plonger dans des pensées angoissantes. Je ne pouvais plus dormir normalement, mon sommeil étant sans cesse troublé par des cauchemars. Il m'était insupportable d'oublier la vie elle-même. Pendant un temps, j'ai essayé de penser à un moyen d'échapper à ce problème, afin de ne pas avoir à quitter l'Islam. J'ai commencé alors à chercher de l'aide dans les Hadiths. Ce n'était pas facile, car les Hadiths couvrent six volumes énormes. De plus, il est très difficile d'appliquer les principes de la science des Hadiths à chaque Hadith. Malgré cela, j'ai poursuivi ma tâche avec l'aide de Dieu.
Selon les Hadiths, il y a trois moyens de salut. Tout d'abord, il n'y a aucun lien entre les oeuvres et le salut. Le pire des pécheurs, qui a passé toute sa vie à violer les commandements de Dieu, peut entrer au paradis. Le meilleur des hommes, qui passe sa vie à faire de bonnes oeuvres, peut aller en enfer. Les Hadiths suivants parlent d'eux-mêmes:
"Hazrat Anas raconte que le Prophète de l'Islam circulait un jour à cheval avec Maadh. Par trois fois, le Prophète a répété: "Celui qui croit et répète honnêtement: "Il n'y a qu'un seul Dieu et Muhammad est son Prophète"ne sera jamais condamné au feu de l'enfer." Maadh lui a dit:"O Prophète de Dieu, est-ce que je ne dois pas proclamer cette bonne nouvelle?" Le Prophète a répondu: " Dans ce cas, ils ne croiront qu'à cela" (Mishkat).
Sur ce même sujet, Abu Dharr a transmis un Hadith. Il force à conclure que le salut par les oeuvres n'a aucun sens, car même l'adultère et le voleur obtiennent le salut en répétant simplement les paroles du credo musulman. Le Hadith déclare donc:
"Abu Dharr a transmis ces déclarations: Je suis allé trouver le prophète; il dormait, recouvert d'un drap blanc. Je suis revenu plus tard et il était réveillé. Il a dit: Tout serviteur de Dieu qui dit: Il n'y a d'autre Dieu qu'Allah, et qui meurt sur ces paroles, entrera au paradis. J'ai dit: Même s'il commet adultère et vol? Il a répondu: Même s'il commet adultère et vol. J'ai dit: Même s'il commet adultère et vol? Il a répondu: Même s'il commet adultère et vol. J'ai dit: Même s'il commet adultère et vol? Il a répondu: Même s'il commet adultère et vol, malgré Abu Dharr" (Muslim, Bukhari).
J'ai trouvé un autre Hadith aussi réjouissant qu'un paquet de bonbons pour un enfant. Il promet que, quoi que l'homme fasse de bien ou de mal, il peut obtenir le paradis en répétant quelques paroles:
"Ubadah bin Samit a transmis que l'Apôtre de Dieu a dit: Quiconque témoigne qu'il n'y a d'autre Dieu qu'Allah, sans autre partenaire, et que Muhammad est son serviteur et apôtre, et que Jésus est le serviteur de Dieu, et son apôtre, et le fils de sa servante, et sa parole qu'il a mis en Marie, et un esprit venant de lui, et qu'il existe un ciel et un enfer, Dieu le fera entrer au paradis, malgré toutes ses oeuvres accomplies sur la terre" (Muslim, Bukhari).
En lisant ces Hadiths, je me suis interrogé pour savoir s'il est juste que quelqu'un qui passe sa vie à faire le mal sans jamais penser au bien, doive entrer au paradis à sa mort, alors qu'un autre qui passe sa vie dans la crainte de Dieu, la discipline et les bonnes oeuvres soit jeté en enfer à sa mort.
Ensuite, les Hadiths montrent que le salut dépend de la miséricorde de Dieu, à tel point que le Prophète de l'Islam est un demandeur lui-même de miséricorde. Si Dieu n'a pas cette miséricorde à lui accorder, le Prophète ne peut obtenir le salut par les oeuvres. Un Hadith nous dit:
"Abu Huraira a transmis que le Prophète de l'Islam avait dit: Aucun de vous n'entrera au paradis par ses bonnes oeuvres. Ils ont dit: Pas même toi, Apôtre de Dieu? Non, pas même moi, sauf si Dieu me couvre de sa grâce et de sa miséricorde. Aussi, soyez affermis, du matin au soir; à chaque instant cherchez à faire le bien" (Mishkat).
Comparez aussi le Hadith suivant:
"Jabir a transmis que le Prophète de l'Islam a dit: Aucune oeuvre que vous faites ne vous assure le ciel, ne vous préserve de l'enfer - pas même moi, sans la grâce de Dieu."
De ces Hadiths, j'ai conclu que personne ne peut obtenir le salut si la miséricorde de Dieu n'est avec lui. Cela m'a consolé en partie, mais je me suis tout de même dit: "Si Dieu est plein de miséricorde, il est également juste aussi. Si Dieu pardonne par sa miséricorde seulement, les exigences de sa justice et de sa justification sont écartées. Cela manifesterait alors une défaillance dans l'être de Dieu. Une telle chose serait indigne de la gloire de Dieu."
Le troisième point que j'ai découvert dans les Hadiths a été que même le Prophète de l'Islam ne peut sauver quelqu'un, pas même sa fille Fatimah, ni ses parents. Ainsi, l'idée que le Prophète peut intercéder en faveur des fidèles - ce que je croyais - était erronée.
Un Hadith dit:
"Abu Huraira a transmis que lorsque le verset: "Pousse tes proches à avoir crainte" a été révélé au Prophète de l'Islam, celui-ci s'est levé et a commencé à déclarer: O peuple de Qur, et vous, fils d'Abdul Manaf, et vous Abbas, fils d'Abdul Muttalib, et vous Safiyyah, ma tante, je ne puis vous sauver du châtiment au jour de la résurrection. Veille sur toi, ma fille Fatimah. Tu peux te servir de mes biens, mais je ne puis te sauver du jugement de Dieu. Veille sur toi" (Bukhari).
Ainsi, après une étude poussée des Hadiths, je ne pouvais aller plus loin. Dans la crainte et le désespoir, j'ai fermé les livres des Hadiths et j'ai prié Dieu: O Dieu mon Créateur et Seigneur, toi qui connais les secrets de mon coeur mieux que moi-même, tu sais depuis quand je recherche la vraie religion. J'ai poussé mon investigation aux limites de mes possibilités. Maintenant, ouvre-moi la porte de ta connaissance et de ton salut. Permets que j'entre dans la compagnie de ton peuple, de ceux qui te sont agréables afin de pouvoir pénétrer dans ta présence, dans la gloire et la joie. Amen."
Dans cet état d'esprit désespéré, j'ai recommencé à lire le Saint Injil, (le Nouveau Testament) avec l'idée de corriger toute erreur d'investigation. En ouvrant le livre, cette fois, mes yeux sont tombés sur ces paroles: "Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés, et je vous donnerai du repos" (Matthieu 11.28).
Je ne saurais dire comment ce passage du Nouveau Testament s'est révélé à moi. Je ne le cherchais pas. D'autre part, ce n'était pas le hasard. C'était la réponse de Dieu à mon investigation. Pour un pécheur tel que moi, c'était vraiment la proclamation suprême de la Bonne Nouvelle. Ce verset a eu sur moi un effet extraordinaire. Il m'a procuré la paix, la consolation et la joie. Il a fait disparaître en moi toute incertitude, toute crainte. Le Messie déclare:
"Je vous donnerai du repos." Il montre comment le salut dépend de lui. Il ne souligne pas simplement un chemin au-dessus ou au-delà de lui. Mais il dit:
"Je suis le chemin, la vérité et la vie. Nul ne vient au Père que par moi" (Jean 14.6).
Je me suis demandé alors si je pouvais avoir confiance dans cette extraordinaire déclaration de Christ. J'ai conclu qu'on pouvait s'y fier car, tout d'abord, Christ est accepté par les musulmans comme sans péché, glorieux dans ce monde et dans l'au-delà, comme la Parole de Dieu et l'Esprit de Dieu. Ces qualifications et d'autres encore sur Jésus indiquent sa perfection. Ensuite, selon les chrétiens, il est le Dieu parfait et l'homme parfait, dépourvu de toute passion et d'ambitions humaines. Ainsi, il est impossible que le Christ qui, selon les musulmans et les chrétiens, possède les plus nobles qualités, commette un péché et fasse quelque chose indigne de lui.
J'ai commencé alors à réfléchir sur les promesses de Christ de me donner le salut. Pour calmer mon esprit, j'ai cherché dans le Saint Injil (le Nouveau Testament), et j'ai trouvé ce verset:
" C'est ainsi que le Fils de l'homme est venu non pour être servi mais pour servir et donner sa vie comme la rançon de plusieurs"(Matthieu 20.28).
En lisant ce verset, j'ai découvert comment Dieu offre le salut. Christ a donné sa vie pour nous pécheurs. C'est un merveilleux moyen auquel le monde n'offre aucune contrepartie. Des multitudes de gens ont fondé des religions dans ce monde, mais aucun d'eux n'a déclaré que sa mort servirait au pardon des péchés. Seul Christ a fait cela, et plus encore, il l'a accompli.
Je suis alors tombé en extase. L'image de Christ et son amour pour les hommes ont fait une impression indélébile sur mon coeur. Mais, je me suis pourtant interrogé: "Pourquoi Jésus a-t-il dû se sacrifier sur la croix? N'aurait-il pas pu apporter le salut sans donner sa vie?" En poussant plus loin ma réflexion, j'ai trouvé aussi la réponse: Dieu est à la fois plein de miséricorde et de justice. Si Christ avait promis le salut sans donner sa vie, les exigences de la miséricorde auraient été remplies. Pour satisfaire aux exigences de la justice, Christ devait payer la rançon, en donnant son sang précieux. C'est ainsi que Dieu a manifesté son amour envers nous.
"Mais Dieu prouve son amour envers nous en ce que lorsque nous étions encore des pécheurs, Christ est mort pour nous"(Romains 5.8).
Bref, j'ai poursuivi mes investigations dans le Nouveau Testament en le lisant plusieurs fois d'un bout à l'autre. J'ai trouvé ainsi des centaines de versets et maintes paraboles, qui me prouvaient, sans l'ombre d'un doute, que le salut (le coeur même et le but de toute la religion) ne peut s'obtenir que par la foi dans le Seigneur Jésus-Christ. Je ne citerai ici qu'un passage:
"Nous savons que tout ce que dit la loi, elle le dit à ceux qui sont sous la loi, afin que toute bouche soit fermée, et que tout le monde soit reconnu coupable devant Dieu. Car nul ne sera justifié devant lui par les oeuvres de la loi puisque c'est par la loi que vient la connaissance du péché. Mais maintenant, sans la loi est manifestée la justice de Dieu à laquelle rendent témoignage la loi et les prophètes, justice de Dieu par la foi en Jésus-Christ pour tous ceux qui croient. Il n'y a point de distinction, car tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu, et ils sont gratuitement justifiés par sa grâce, par le moyen de la rédemption qui est en Jésus-Christ. C'est lui que Dieu a destiné par son sang, à être pour ceux qui croiraient victime propitiatoire afin de montrer sa justice, parce qu'il avait laissé impunis les péchés commis auparavant, au temps de sa patience"(Romains 3.19-25).
MA DÉCISION ET MA CONFESSION
C'est ainsi qu'après avoir terminé mes investigations, je suis arrivé à la conclusion que je devais devenir chrétien. Dans de telles circonstances, il m'a semblé honorable de présenter ma situation à la société dont j'étais toujours président, pour que mes amis aient connaissance de ma recherche et que je sois libéré de toute accusation de poursuivre des recherches en secret.
Je me suis rendu à la réunion, comme d'habitude. Munshi Mansur Masîh était prêt à parler. C'est alors que j'ai interrompu le cours normal de la réunion en déclarant que cette fois, ce serait moi qui mettrai l'Islam en cause. J'ai donc décrit les résultats de mes années de recherche. Les responsables de la société étaient stupéfaits de m'entendre, mais ils se sont consolés dans l'espoir que j'allais apporter la controverse à mes propres déclarations. Après avoir terminé, je me suis assis. Le vice-président a dit: "On espère que le président lui-même réfutera son adresse défavorable."
Mais je me suis levé en disant: "Écoutez mes amis. Ce que je viens d'expliquer n'est pas quelque chose de superficiel ou d'imaginé pour la circonstance. Ce sont mes convictions profondes et décisives, fondées sur des années d'investigation. Pour être plus précis, cela a commencé le jour où Munshi Mansur Masih nous a parlé du salut. A ce moment-là, j'ai promis à Dieu de lire la Sainte Bible, non pas comme je l'avais fait jusque là ou auparavant, mais en cherchant la vérité, afin que le chemin de la vérité et de la justification me soit révélé. Ainsi, en mettant de côté tout préjugé et toute querelle philosophique, j'ai comparé la Bible et le Coran. Je suis arrivé à la conclusion que le salut ne se trouve qu'en Jésus-Christ. C'est tout ce que j'ai à dire. S'il s'est glissé quelque déformation ou défaut dans mon étude, je serai reconnaissant que vous me le montriez. D'autre part, si vous désirez que je réfute ces arguments, je vous dirai franchement que je ne puis y répondre. Personne d'autre ne pourra apporter de réponse."
J'ai quitté la salle, car il était imprudent que je reste. Munshi Mansur Masih m'a tout de suite suivi. Il a jeté ses bras autour de mon cou en pleurant de joie, et en murmurant d'une voix tremblante:
"Venez chez moi ce soir. Il n'est pas prudent que vous restiez seul dans votre chambre." J'ai répondu que les responsables de mon organisation étaient des hommes intelligents, et que je n'avais rien à craindre d'eux."Bien sûr," ai-je ajouté,"il y en a d'autres dont je pourrais avoir peur. Je viendrai avant l'aube. Si vous ne me voyez pas à ce moment, venez me rejoindre chez moi."
Nous nous sommes séparés. Je me suis enfermé dans ma chambre, et j'ai éteint la lumière. Je me suis assis, plongé dans mes pensées. Je n'oublierai jamais les idées qui ont traversé mon esprit, et mes luttes spirituelles, pendant toute la nuit, une nuit de décision, de terrible mise à l'épreuve. A certains moments, je me suis dit que si je devenais chrétien, j'allais perdre mon pays, mon héritage, mes droits, ma famille, mes amis - en quelque sorte, tout. J'ai été aussi troublé par l'idée que devenir chrétien voulait dire entrer dans un monde où les pratiques et les habitudes différaient totalement de ce que j'avais vécu jusqu'alors. Je n'ai pas pu dormir cette nuit-là.
Enfin, je me suis dit: Sultan, réfléchis, tu es l'enfant d'une heure, d'un monde qui passe. Quand tu mourras, ton pays, ton héritage ne te seront d'aucun secours, ni ta famille, ni tes amis. Tout cela appartient à ce monde. Seule ta foi va au-delà de la tombe. Aussi, il n'est donc pas sage d'oublier la vie éternelle et le bonheur spirituel au profit de cette vie transitoire. Je me suis mis à genoux devant Dieu, et j'ai prié: "O Dieu éternel et omnipotent, toi qui sondes tous les coeurs, je veux m'attacher à toi. Accepte cette offrande, protège-moi de toutes les ruses de Satan et des dangers spirituels. Enlève de mon coeur la mondanité et ses désirs. Donne-moi le courage et la force, afin que je puisse confesser ton Fils unique Jésus-Christ, devant tous les hommes. Entends et accepte ma prière à cause de Jésus-Christ. Amen."
Après cela, je me suis assoupi un bref instant. En me réveillant, j'étais heureux et dans la joie sans aucune ombre d'angoisse ni de crainte.
Le jour se levait. J'ai fait ma toilette pour me rendre chez Munshi Mansur Masih. En arrivant chez lui, je me suis rendu compte combien il avait eu du souci pour moi. Il savait que j'avais l'habitude de prendre le thé, et avait tout préparé. Après cela, nous avons parlé un moment, puis nous avons prié ensemble. Ensuite, nous nous sommes rendus chez le Pasteur Ledgeard.
Le Pasteur a été surpris d'une visite aussi matinale. Munshi Mansur Masih lui a dit que j'étais venu pour être baptisé. Il a commencé par croire que nous ne parlions pas sérieusement. Mais en apprenant ce qui s'était passé la veille, il s'est levé immédiatement, et a dit en m'embrassant: " Je savais que si vous lisiez la Bible sérieusement, vous deviendriez chrétien. Que Dieu soit béni, vous avez été convaincu."J'ai été baptisé le 6 août 1903 dans l'Église St. Paul de Bombay. Tout de suite après la cérémonie, j'ai été envoyé à Kanpur, car il était dangereux de rester à Bombay.
Un merveilleux changement a eu lieu lorsque j'ai reçu Jésus-Christ. Mes paroles, mes actions, toute ma manière de vivre ont été transformées au point qu'un an plus tard, quand je me suis rendu à Bombay pour une visite, mes amis musulmans n'en revenaient pas. Ils ont été émerveillés de ma douceur, car ils savaient combien je me mettais facilement en colère.
Avant de recevoir Jésus-Christ, je reconnaissais le péché. Mais je ne comprenais pas, comme je le fais maintenant, la force dangereuse et destructive qu'il a. Je suis toujours un homme plein de faiblesse, une poignée de poussière, mais quand j'ai péché, je ne peux décrire le honte et le regret qui me remplissent. Je me prosterne jusqu'à terre dans les larmes pour me repentir et demander le pardon. Cette attitude n'est possible qu'en reconnaissant le sacrifice du Seigneur Jésus-Christ. Le péché ne peut disparaître par la repentance seulement. Il doit être purifié par le sang de notre Sauveur. C'est pour cette raison que le monde qui prend le péché à la légère court à sa perte.
Bien que Satan m'attaque de toutes ses forces, je ne suis pas troublé, parce que je crois que Christ lui a brisé la tête. Il ne peut faire du mal aux serviteurs fidèles, car Christ l'a vaincu. Il ne peut rien contre eux. Que Dieu, le Créateur du ciel et de la terre, celui qui sonde les coeurs, transforme le coeur de mes frères musulmans comme il a transformé le mien, et leur donne la vision, afin que, en pensant au jour du jugement, ils comprennent leur profond besoin spirituel et viennent au Seigneur Jésus-Christ.
Croyez, mes chers frères musulmans, que je suis celui qui vous souhaite tout le bien spirituel.
Je suis né en Afghanistan en 1881. Mon père, Payanda Khan,habitait Logar, à environ 75 km au sud de la ville de Kaboul. Il était colonel dans l'armée afghane, et portait le titre de Bahadur Khan. Tout le pays connaissait le colonel Bahadur Khan. Il avait deux épouses. La première était une proche parente qui lui avait donné trois filles, mais pas de fils. Donc, pour ne pas laisser sa famille sans descendance mâle, il a épousé la fille de Sayyid Mahmud Aqa, qui était membre d'une des plus nobles et célèbres familles d'Afghanistan. Mon jeune frère, Taj Muhammad Khan, et moi étions le fruit de ce mariage.
Peu après son arrivée de Russie pour accéder au trône de Kaboul, l'émir Abdur Rahman Khan a fait arrêter six des plus éminentes personnalités du pays pour les envoyer dans un lieu inconnu. Mon père faisait partie de ce groupe. Plus tard, elles ont été toutes exécutées. Puis, une deuxième tragédie a touché notre famille. Pour des raisons politiques, mes deux oncles maternels étaient arrêtés et enfermés dans la prison d'état de Kaboul pour être ensuite exilés en Inde. Mon troisième oncle maternel, avec la permission de l'émir, a pu quitter l'Afghanistan avec sa mère et ses serviteurs pour s'installer en Inde. Le reste de notre famille restait à Kaboul.
En Inde, ils se sont installés dans la ville de Hasan Abdal. A la suite d'autres difficultés politiques, toute notre famille a dû quitter Kaboul pour se rendre à Hasan Abdal. Quelques mois plus tard, ma mère est décédée. Suite à une réconciliation avec l'émir Abdul Rahman Khan, ma famille a pu revenir en Afghanistan, à l'exception de mes trois oncles et de moi-même.
Je suis arrivé plus tard à Delhi, pour entrer au Madrasa-i-Fatehpuri, afin de me perfectionner dans l'étude de l'arabe. A cette époque, l'école était dirigée par l'imam Abdul Jalil; le sous-directeur était Fateh Muhammad Khan. Ces deux hommes sympathiques m'ont aidé à terminer mes études de logique et à poursuivre celles des Hadiths et Commentaires. Pendant la journée, j'étudiais avec mes camarades de classe. Le soir, je prenais des leçons particulières avec Abdul Jalil. C'est ainsi que par la grâce de Dieu, j'ai pu me spécialiser aussi dans ces matières.
PREMIÈRE RENCONTRE AVEC DES CHRÉTIENS
Un jour, en rentrant d'une promenade avec quelques amis, nous avons vu une grande foule, non loin de notre école. En arrivant sur les lieux, nous avons écouté une discussion entre un prédicateur chrétien et un élève de notre école sur la doctrine de la Trinité. Le premier s'appuyait sur la doctrine dans ce verset du Coran:
"Nous sommes plus près de lui que la veine de son cou."(Sourate Qaf 50.16)
(Les références coraniques sont tirées du Coran, traduit par D. Masson et revu par le Dr Sobhi El-Saleh, éditions Gallimard, 1967. )
Il soutenait qu'ici, nahnu, la première personne du pluriel est utilisée, et que si l'unité de Dieu était absolue, la première personne du singulier, ana, devrait être employée. Comme l'étudiant répondait mais en s'écartant du sujet, mes amis m'ont poussé à répondre au prédicateur. Je me suis donc avancé, et j'ai déclaré que la première personne du pluriel est utilisée selon l'usage idiomatique arabe sur un plan honorifique, sans indiquer le pluriel.
C'était la première fois que j'ai discuté avec un chrétien. Ce jour-là est né en moi un désir profond de discuter avec des chrétiens, un désir qui venait d'une ferveur enracinée pour les choses sacrées. Par la suite, et chaque fois que cela m'était possible, j'ai commencé à rechercher des livres qui attaquaient le Christianisme. J'ai fait une étude attentive de ces écrits, et certains jours précis, je me rendais à la place publique tout près de notre école pour discuter avec des prédicateurs chrétiens.
Un jour, un pasteur anglais qui avait l'habitude d'accompagner les prédicateurs, m'a donné sa carte en m'invitant à lui rendre visite. Il a été assez aimable pour me dire d'amener des amis si je voulais. C'est ainsi qu'avec deux ou trois amis, je suis allé le voir. C'était un homme accueillant et sympathique. Il nous a offert du thé, et nous avons commencé à discuter de la religion. Se tournant vers moi, il m'a demandé: "Est-ce que vous lisez la Bible?" "Pourquoi devrais-je lire la Bible, ai-je répondu? Qui veut lire un livre modifié sans cesse?" A ces mots, le visage de cet homme a changé; il paraissait navré de mes paroles. Enfin, avec un demi-sourire il a dit: "Pensez-vous que tous les chrétiens sont des malhonnêtes? Croyez-vous que notre crainte de Dieu est si faible que nous trompons les gens en apportant des changements aux Saintes Écritures? Quand les musulmans disent que les chrétiens continuent à modifier le texte de la Torah et de l'Injil (l'Évangile), ils pensent que tous les chrétiens sont malhonnêtes, qu'ils trompent leur prochain. C'est là une grave accusation, totalement injustifiée. Les chrétiens croient que la Bible est la Parole de Dieu, comme les musulmans croient au Coran. Ainsi, si aucun musulman n'a le droit de changer le texte du Coran, comment un chrétien pourrait-il changer le texte du Livre de notre Dieu plein de sagesse, de la Sainte Bible? Si un musulman malveillant avait changé le texte d'un verset du Coran, tous les autres musulmans ne verraient-ils pas en lui quelqu'un qui s'est ouvertement écarté de l'Islam, et ne publieraient-ils pas quelques déclarations à son sujet? De la même manière, si un chrétien mal intentionné cherchait à changer un verset des Écritures, les autres chrétiens ne le considéreraient-ils pas comme en-dehors de leur religion, et ne feraient-ils pas connaître leur point de vue à son sujet? Bien sûr. Vous voyez ainsi que l'argument des musulmans, selon lequel le texte de la Parole de Dieu a été changée, est sans aucun fondement. Je crois que cela provient des musulmans plutôt ignorants de la Bible, de la foi et des doctrines chrétiennes."
Ensuite, ce pasteur m'a remis deux Bibles, une en arabe et l'autre en persan. Il m'a vivement encouragé à les lire. Nous l'avons remercié, et sommes partis. L'objectif de ce pasteur ne m'intéressait pas quant au don qu'il m'avait fait. Ce qui m'intéressait dans la lecture de la Bible était d'y trouver des erreurs, et de prouver par là que l'Islam était la vérité, en réduisant les chrétiens au silence dans toute discussion. D'ailleurs, je n'ai pas pris la peine de lire la Bible d'un bout à l'autre. J'ai seulement cherché ces passages que les musulmans citent dans leurs controverses. En bref, pendant mon séjour à Delhi, je me suis consacré à mener une controverse avec les chrétiens.
D'AUTRES ÉTUDES
En ce temps-là, j'ai décidé de me rendre à Bombay. J'ai eu la chance, en arrivant, de rencontrer l'imam Hidayat Ullahqui était un homme d'autorité et un grand penseur, très respecté dans la région. Il était de Kaboul et connaissait bien ma famille. Dès que nous avons appris à nous connaître, il m'a promis son aide pour parfaire mon instruction. Il pensait que mes études étaient presque terminées, et m'a conseillé de m'attacher désormais aux études littéraires. Il m'a autorisé à me servir de sa remarquable bibliothèque. J'ai donc commencé ces nouvelles études sous sa direction. Comme il avait passé la plupart de sa vie à Constantinople, en Égypte et en Arabie, il était expert sur le sujet. Son enseignement en langue persane, notre langue maternelle à tous deux, a bien facilité la tâche.
A ce moment, un autre expert en logique et philosophie est arrivé d'Égypte pour occuper un poste de professeur au Madrasa-i-Zakariyya. Cet homme était l'imam Abdul Ahad qui était du district de Djalalabad en Afghanistan. Comme on me parlait de sa célébrité, je suis entré au Madrasa-i-Zakariyya pour y étudier les derniers livres en matière de logique et de philosophie. L'imam m'a traité comme un fils, en m'octroyant une pièce à côté de la sienne, afin que je puisse le consulter quand j'en avais besoin.
D'AUTRES DISCUSSIONS AVEC LES CHRÉTIENS
Un jour, au cours d'une promenade avec quelques camarades de notre école, nous sommes arrivés à Dhobi Talab. Là, nous avons vu des prédicateurs chrétiens parler aux gens. Immédiatement, mon hostilité du passé s'est réveillée en pensant à mes expériences vécues à Delhi. J'avançais vers les prédicateurs quand un camarade m'a arrêté par ces paroles: "Imam Sahib, ne t'occupe pas de ces gens, car discuter avec eux serait du temps perdu. Ces pauvres camarades ne savent pas comment mener une discussion, ni les règles d'un débat. Ils sont payés pour faire ce travail, et ils sont en train de remplir leur devoir, donc ce n'est pas la peine de discuter avec eux." J'ai répondu:"Je sais tout sur ces gens. Ils ne connaissent ni l'art ni les règles du débat certes, mais ils savent certainement égarer les gens en leur enseignant la fausseté. Il est de la responsabilité de tout bon musulman de sauver ses frères mal avisés de leur machination." Je me suis avancé, et j'ai commencé à leur lancer un lot d'objections. Ils ripostaient aussi par des rafales d'objections à mes objections.
Finalement, la discussion a été abrégée par manque de temps. La nouvelle de notre rencontre s'est vite répandue parmi les étudiants de l'école. Ils ont été eux aussi animés du zèle de s'engager dans la discussion. Nous allions régulièrement deux fois par semaine discuter avec les chrétiens. Éventuellement, deux missionnaires nous ont invités chez eux avec l'accord de leur chef catéchiste, Mr Joseph Bihari. Pendant que nous y étions, ils nous ont suggéré l'ouverture d'une salle de lecture près de notre école si nous voulions sincèrement découvrir la vérité sur le Christianisme. Ceci pourrait nous permettre de continuer notre investigation au moins une fois par semaine, puisque Dhobi Talab était trop éloigné. J'ai accepté avec reconnaissance cette offre. Lorsque la salle de lecture était ouverte, nous y tenions notre réunion selon un programme défini. Ayant constaté que les étudiants et mes autres camarades ne savaient rien sur le Christianisme et n'étaient pas expérimentés dans les débats, j'ai loué une autre maison sur le conseil de l'imam Abbas Khan Sahib. Nous avons formé un groupe appelé: "Nadwatul Mutakallimin".Le but de ce groupe était de préparer ou former des controversistes contre toute religion non islamique et en particulier le Christianisme.
Quand mon professeur a constaté que j'étais toujours préoccupé par les débats et que je ne m'intéressais à rien d'autre, il est venu dans ma chambre un jour après la prière du soir. A ce moment je lisais l'Injil (le Nouveau Testament), et il m'a demandé ce que je lisais. Je lui ai répondu: "l'Injil". Avec colère, il m'a repris en ces termes: "Je crains que tu ne deviennes chrétien."J'ai été très choqué par sa réplique. Quoique je n'aie pas voulu lui manquer de respect, j'ai été obligé de lui répondre: "Pourquoi deviendrais-je chrétien? La simple lecture de l'Injil rend-elle l'homme chrétien? Je lis pour mieux combattre et détruire le Christianisme jusqu'à ses racines, et non pour devenir chrétien. Tu devrais plutôt m'encourager, au lieu de me faire des reproches." Il m'a répondu:" Je dis cela parce que j'ai appris que celui qui lit l'Injil devient chrétien. Ne te souviens-tu pas de ce qu'a dit un certain poète? Quand un fidèle musulman lit l'Injil, son coeur se détourne de l'Islam." "Cette information n'est pas juste," ai-je répondu.
Après m'avoir donné d'autres conseils, l'imam est retourné dans sa chambre.
VOYAGE ALLER RETOUR EN ARABIE
Ce conflit religieux s'est poursuivi pendant quelques années quand, soudain, j'ai eu l'ardent désir de faire le pèlerinage à La Mecque. Immédiatement, je me suis préparé pour ce voyage, et je me suis embarqué sur le bateau Shah-i-Nurpour Jeddah, et de là, je suis allé à La Mecque.
Le jour du pèlerinage, j'ai revêtu le vêtement de circonstance pour me rendre à Arafat. C'est ce jour-là que j'ai découvert quelque chose de merveilleux: les riches et les pauvres, les haut-placés et les classes inférieures, tous portaient le même vêtement blanc. C'était comme si tous les morts étaient sortis du tombeau pour rendre compte à Dieu de leurs oeuvres. Cette vue m'a fait monter les larmes aux yeux. Mais en même temps, une pensée m'a traversé l'esprit: Si l'Islam n'est pas la seule religion vraie, qu'en sera-t-il de moi au jour de la résurrection? C'est alors que j'ai prié:
"O Dieu, montre-moi la vraie religion, la bonne voie. Si l'Islam est la vraie religion, que j'y reste fidèle. Fais-moi la grâce de réduire au silence toute opposition. Si le Christianisme est la vraie religion, révèle-moi la vérité. Amen."
Après une courte visite à Médine, je suis revenu à Bombay. Pendant mon absence, le Nadwatul Mutakallimin avait cessé de tenir ses réunions. J'ai alors organisé une autre société. J'en suis devenu le président, et Abdur Rauf le secrétaire-général. C'est chez lui que nous nous réunissions. Une de nos règles était qu'une fois par semaine, on invitait un non-musulman à prendre la parole, et l'un de nos membres pouvait lancer une controverse. Munshi Mansur Masih venait ainsi régulièrement au nom des chrétiens. D'autres venaient prendre la parole pour d'autres religions.
UN DÉNOUEMENT VITAL
Un jour, Munshi Mansur Masih a déclaré avec une grande conviction qu'il n'y avait pas de salut dans l'Islam. Les membres de notre société m'ont demandé de lui répondre. J'ai essayé de toutes mes forces de prouver qu'il y a un salut assuré et parfait dans l'Islam. L'auditoire a apprécié mes arguments. Et pourtant, je savais bien qu'au fond de moi-même, je n'avais pas la certitude de ce que j'avançais. Même en parlant, j'ai dû admettre la faiblesse de ma position. Bien que je me manifestais avec force et éclat, la voix de mon interlocuteur criait dans mon âme avec une force indescriptible.
Il était presque onze heures du soir lorsque cette discussion a pris fin. Je suis rentré chez moi, et me suis mis à réfléchir à tout ce que Munshi Mansur Masih avait dit. Plus je réfléchissais, plus il me semblait évident que le salut est le souffle même de la religion et son fondement indispensable. Sans lui, une religion n'est pas une religion.
De plus, je pensais que tout le monde était bien d'accord que l'homme est un paquet d'oublis, de désobéissances, de péchés. Sa vie n'est jamais assez pure pour être libérée des marques du péché. Le péché est devenu la seconde nature de l'homme. La question est de savoir comment on peut échapper aux comptes que l'on doit rendre, et au châtiment. Comment être sauvé? Que dit l'Islam à ce sujet? Quel est le message du Christianisme? Mon devoir était d'étudier ce sujet si important avec honnêteté et sans préjugés. Si je découvrais que le salut peut s'obtenir par l'Islam, je remercierais Dieu! Combien mes yeux brilleraient, combien mon coeur serait dans la joie! Sinon, je devais chercher cette religion qui offre un plan satisfaisant pour le salut. Devant cette décision à prendre, je suis tombé à genoux dans la prière devant Dieu. J'ai pleuré amèrement, en admettant que désormais je ne lirais pas la Bible comme je l'avais fait jusqu'à présent. Je la lirais afin de découvrir, moi, pauvre pécheur, le chemin du salut.
MA RECHERCHE DU SALUT
C'est ainsi qu'à partir de ce jour, mon attitude a changé. Je suis devenu un véritable chercheur de la vérité. J'ai commencé à lire avec attention la Bible, et à la comparer au Coran. Pour garder mon esprit en paix, j'ai emprunté un exemplaire de l'Avesta, le livre saint de la religion zoroastrienne, et j'ai acheté le Satyarth Prakash, un des saints livres de l'hindouisme. Mais après avoir bien étudié ces deux livres, j'ai conclu que le pardon des péchés, et donc le salut, ne se trouvent pas dans ces deux religions.
La plus lourde tâche restait devant moi: celle d'une étude approfondie du Coran et des meilleures des Hadiths. Avant de commencer ma recherche de la doctrine du salut dans ces oeuvres, j'ai levé mes mains vers Dieu dans la prière: "O Dieu, tu sais ce que je suis. Je suis né musulman, et mes ancêtres à chaque génération sont nés aussi dans cette religion. Ils sont morts dans la même foi. J'ai fait mes études, j'ai été élevé dans cette religion. Maintenant, ôte tout obstacle qui pourrait m'entraver dans mes découvertes de ta voie. Montre-moi le chemin du salut, de ton salut, afin que, lorsque je quitterai ce monde transitoire, je te sois agréable. Amen. "
Ce que j'ai trouvé dans mon étude du Coran a été ce que j'avais toujours connu: que le salut ne s'obtient que par les bonnes oeuvres: J'ai trouvé de nombreux versets qui présentent cette doctrine. Je n'en mentionne que deux ici:
"Ceux qui croient et qui accomplissent des oeuvres bonnes auront les Jardins du Refuge comme lieu de séjour pour prix de leurs actions. Quant aux pervers, ils auront le Feu comme refuge. Chaque fois qu'ils voudront en sortir, ils y seront ramenés et on leur dira: Goûtez ce châtiment du Feu que vous traitiez de mensonge" (Sourate La Prosternation 32.19,20).
"Celui qui aura fait le poids d'un atome de bien, le verra; celui qui aura fait le poids d'un atome de mal, le verra" (Sourate Le Tremblement de Terre 99.7,8).
A première vue, ces versets sont très beaux et offrent des consolations, mais ils ont soulevé une question dans mon esprit:"Est-il possible de faire seulement le bien et non le mal? Est- ce dans le pouvoir de l'homme?" En réfléchissant à cela, et en même temps tenant compte des capacités et passions des hommes, j'ai compris que rester sans péché est impossible. L'homme n'a jamais le pouvoir de faire sans cesse le bien, et le bien seulement.
Les philosophes d'Arabie ont déclaré que l'homme a quatre facultés pour le faire passer à l'action. Parmi ces quatre, trois, particulièrement fortes, s'opposent à l'intérêt spirituel de l'homme. Il n'y en a qu'une, une faculté angélique, qui pousse l'homme vers Dieu, qui l'aide à obéir aux commandements divins. Mais ses résultats sont cachés aux yeux de l'homme. D'autre côté, il y a la force combinée des trois autres facultés, dont les résultats sont tels que l'homme les aime tout de suite. Ainsi, comme l'homme ne voit que ce qui est à la surface et se soucie seulement du présent, il s'attache surtout aux choses du monde, il oublie facilement les choses de l'Esprit et de Dieu. Un musulman bien connu a déclaré un jour à ce sujet:
"Je suis pris au piège par quatre choses, dont l'influence cause ma misère et mes souffrances. Ces quatre choses sont Satan, le monde, la convoitise, la méchanceté. Comment me débarrasser de ces forces alors qu'elles sont mes ennemies? Le mal veut me séduire et me jeter dans le gouffre obscur de la sensualité et du plaisir."
Les trois facultés ont dominé la faculté angélique, et Adam a fait ce que Dieu lui avait défendu de faire. Le résultat a été hérité par ses descendants jusqu'à nos jours. Un Hadith raconte:
"Selon Abu Huraira, l'Apôtre de Dieu a dit: Quand Dieu a créé Adam, il lui a frappé le dos et il en est tombé tous les hommes qu'il créait depuis ses descendants jusqu'au jour de la Résurrection. Dieu a mis devant chaque homme un éclair de lumière. Adam a vu alors un homme parmi le groupe dont l'éclair de lumière l'a étonné. Il a demandé: Mon Seigneur, qui est celui-là? Dieu a répondu: David. Alors Adam a dit: Seigneur, à combien s'étend sa vie? Il a répondu: soixante ans. Adam a dit: Mon Seigneur, augmente-la de quarante ans en les prenant sur ma vie. L'Apôtre de Dieu a dit: Lorsqu'il ne restait que 40 ans à la vie d'Adam, l'ange de la mort lui est apparu. Et Adam lui a dit: N'y-a-t-il pas encore quarante ans de ma vie qui restent? Il a répondu: Ne les as-tu pas donnés à ton fils David? Alors Adam a nié l'avoir fait et ses descendants ont nié aussi, et Adam a oublié, et a mangé de l'arbre, et ses descendants ont oublié, et Adam a péché ainsi que ses descendants"(Tirmidhi).
Cet Hadith nous dit que tous les enfants d'Adam sont des pécheurs sans manquer, parce que le péché d'Adam les a atteints. C'est ainsi que des saints célèbres et des responsables religieux ont confessé leurs péchés. Adam, le premier de tous les prophètes, et sa femme, Eve, ont dit:
"Notre Seigneur! Nous nous sommes lésés nous-mêmes. Si tu ne nous pardonnes pas, et si tu ne nous fais pas miséricorde, nous serons au nombre des perdants" (Sourate Al-Araf 7.23).
Le prophète Abraham dit de même:
"Notre Seigneur! Accorde ton pardon à moi-même, à mes parents et aux croyants le Jour où apparaîtra le compte final" (Sourate Abraham 14.41).
Le Prophète de l'Islam a fait lui-même cette prière:
"O Dieu, lave mes iniquités avec l'eau qui vient de la neige"(Bukhari).
Abu Bakr, le premier Calife de l'Islam dit dans son célèbre poème:
"O Dieu, comment serai-je sauvé, car il n'y a aucun bien en moi? Je suis écrasé par mes iniquités alors que je veux le bien."
Le Coran lui-même considère que tous les hommes sont pécheurs:
"Oui, l'homme est ingrat envers son Seigneur: il est témoin de tout cela mais son amour des richesses est plus fort" (Sourate Les Chevaux 100.6,7).
J'ai pensé alors à ce sujet: Le prophète Jésus est aussi un homme. Le Coran parle des péchés des autres prophètes. Mais pourquoi le Coran ne parle-t-il pas du péché de Jésus?
"(L'ange Gabriel) dit: "Je ne suis que l'envoyé de ton Seigneur pour te donner un garçon pur" (Sourate Marie 19.19).
Comme le Coran fait état de Jésus sans péché, je me suis tourné vers l'Injil (le Nouveau Testament). J'ai trouvé alors les passages suivants:
"Qui de vous me convaincra de péché?" (Jean 8.46);
"Celui qui n'a point connu le péché, il l'a fait devenir péché pour nous afin que nous devenions en lui justice de Dieu." (2 Corinthiens 5.21);
"Car nous n'avons pas un souverain sacrificateur qui ne puisse compatir à nos faiblesses; au contraire, il a été tenté comme nous en toutes choses, sans commettre de péché."(Hébreux 4.15);
"Lui qui n'a point commis de péché, et dans la bouche duquel il ne s'est point trouvé de fraude..." (1 Pierre 2.22);
"Or, vous le savez, Jésus a paru pour ôter les péchés, et il n'y a point en lui de péché." (1 Jean 3.5)
Ainsi, nous avons de solides preuves pour attester qu'à l'exception du prophète Jésus, tous les hommes sont pécheurs. Dans de telles circonstances, qui suis-je pour m'imaginer que je vais obtenir le salut par de bonnes oeuvres, alors que de nombreux responsables religieux, des philosophes et des saints n'y sont pas arrivés?
J'ai de nouveau ouvert le Coran, pour étudier son enseignement sur la doctrine du salut par les oeuvres. Je cite deux versets seulement qui montrent clairement qu'aucun être humain, quel qu'il soit, ne peut échapper à la perdition:
"Il n'y a personne de vous qui n'y sera précipité: c'est un arrêt décidé par ton Seigneur. Nous sauverons ensuite ceux qui craignaient Dieu et nous y laisserons les injustes agenouillés"(Sourate Marie 19.71,72).
Personne ne peut savoir quelle déception, quelle terreur, quelle stupéfaction, j'ai éprouvé en lisant ces paroles. Moi, un homme spirituellement malade, je lisais le Coran comme on irait consulter un médecin, afin qu'il me donne des remèdes pour mon état de péché. Au lieu de me donner ces remèdes, il m'a dit: "Vous irez tous vers la perdition, car c'est voulu du Seigneur sans manquer."
Mon amour naturel et mon attachement à la foi islamique m'interdisaient de suivre Jésus avec précipitation. Je me suis mis à chercher un commentaire sur ce verset dans les Hadiths, pour voir ce que le Prophète de l'Islam pensait à ce sujet. Après une longue étude, j'ai trouvé le Hadith suivant dans la Mishkat:
Ibn Masud a dit que le Prophète de l'Islam avait ainsi parlé: Tous les hommes iront en enfer. Puis ils en sortiront selon leurs oeuvres. Ceux qui en sortiront en premier le feront comme l'éclair, ensuite les autres comme un grand vent, les autres comme un cheval au galop, puis comme un coureur rapide, ensuite comme un homme qui se hâte, enfin comme un homme qui marche" (Tirmidhi et Darimi).
Le sens du verset était clair à présent. Il est inévitable que tout homme doit d'abord aller en enfer, puis en sortir selon ses oeuvres. Bien que la signification du Coran soit claire et que le prophète de l'Islam s'y attache, et bien que, selon mon désir, je puisse mettre fin à mes recherches, j'ai jugé préférable de chercher le sens de cet hadith dans le Coran lui-même. Et voici, après une longue étude, le verset que j'ai trouvé:
"Si ton Seigneur l'avait voulu, il aurait rassemblé tous les hommes en une seule communauté, mais ils ne cessent pas de se dresser les uns contre les autres, à l'exception de ceux auxquels ton Seigneur a fait miséricorde et c'est pour cela qu'il les a créés. La Parole de ton Seigneur s'accomplit: Je remplirai certainement la Géhenne (l'enfer) de Djinns et d'hommes réunis" (Sourate Houd 11.118,119).
J'ai été tellement frappé par ce verset que j'ai fermé lentement le Coran pour me plonger dans des pensées angoissantes. Je ne pouvais plus dormir normalement, mon sommeil étant sans cesse troublé par des cauchemars. Il m'était insupportable d'oublier la vie elle-même. Pendant un temps, j'ai essayé de penser à un moyen d'échapper à ce problème, afin de ne pas avoir à quitter l'Islam. J'ai commencé alors à chercher de l'aide dans les Hadiths. Ce n'était pas facile, car les Hadiths couvrent six volumes énormes. De plus, il est très difficile d'appliquer les principes de la science des Hadiths à chaque Hadith. Malgré cela, j'ai poursuivi ma tâche avec l'aide de Dieu.
Selon les Hadiths, il y a trois moyens de salut. Tout d'abord, il n'y a aucun lien entre les oeuvres et le salut. Le pire des pécheurs, qui a passé toute sa vie à violer les commandements de Dieu, peut entrer au paradis. Le meilleur des hommes, qui passe sa vie à faire de bonnes oeuvres, peut aller en enfer. Les Hadiths suivants parlent d'eux-mêmes:
"Hazrat Anas raconte que le Prophète de l'Islam circulait un jour à cheval avec Maadh. Par trois fois, le Prophète a répété: "Celui qui croit et répète honnêtement: "Il n'y a qu'un seul Dieu et Muhammad est son Prophète"ne sera jamais condamné au feu de l'enfer." Maadh lui a dit:"O Prophète de Dieu, est-ce que je ne dois pas proclamer cette bonne nouvelle?" Le Prophète a répondu: " Dans ce cas, ils ne croiront qu'à cela" (Mishkat).
Sur ce même sujet, Abu Dharr a transmis un Hadith. Il force à conclure que le salut par les oeuvres n'a aucun sens, car même l'adultère et le voleur obtiennent le salut en répétant simplement les paroles du credo musulman. Le Hadith déclare donc:
"Abu Dharr a transmis ces déclarations: Je suis allé trouver le prophète; il dormait, recouvert d'un drap blanc. Je suis revenu plus tard et il était réveillé. Il a dit: Tout serviteur de Dieu qui dit: Il n'y a d'autre Dieu qu'Allah, et qui meurt sur ces paroles, entrera au paradis. J'ai dit: Même s'il commet adultère et vol? Il a répondu: Même s'il commet adultère et vol. J'ai dit: Même s'il commet adultère et vol? Il a répondu: Même s'il commet adultère et vol. J'ai dit: Même s'il commet adultère et vol? Il a répondu: Même s'il commet adultère et vol, malgré Abu Dharr" (Muslim, Bukhari).
J'ai trouvé un autre Hadith aussi réjouissant qu'un paquet de bonbons pour un enfant. Il promet que, quoi que l'homme fasse de bien ou de mal, il peut obtenir le paradis en répétant quelques paroles:
"Ubadah bin Samit a transmis que l'Apôtre de Dieu a dit: Quiconque témoigne qu'il n'y a d'autre Dieu qu'Allah, sans autre partenaire, et que Muhammad est son serviteur et apôtre, et que Jésus est le serviteur de Dieu, et son apôtre, et le fils de sa servante, et sa parole qu'il a mis en Marie, et un esprit venant de lui, et qu'il existe un ciel et un enfer, Dieu le fera entrer au paradis, malgré toutes ses oeuvres accomplies sur la terre" (Muslim, Bukhari).
En lisant ces Hadiths, je me suis interrogé pour savoir s'il est juste que quelqu'un qui passe sa vie à faire le mal sans jamais penser au bien, doive entrer au paradis à sa mort, alors qu'un autre qui passe sa vie dans la crainte de Dieu, la discipline et les bonnes oeuvres soit jeté en enfer à sa mort.
Ensuite, les Hadiths montrent que le salut dépend de la miséricorde de Dieu, à tel point que le Prophète de l'Islam est un demandeur lui-même de miséricorde. Si Dieu n'a pas cette miséricorde à lui accorder, le Prophète ne peut obtenir le salut par les oeuvres. Un Hadith nous dit:
"Abu Huraira a transmis que le Prophète de l'Islam avait dit: Aucun de vous n'entrera au paradis par ses bonnes oeuvres. Ils ont dit: Pas même toi, Apôtre de Dieu? Non, pas même moi, sauf si Dieu me couvre de sa grâce et de sa miséricorde. Aussi, soyez affermis, du matin au soir; à chaque instant cherchez à faire le bien" (Mishkat).
Comparez aussi le Hadith suivant:
"Jabir a transmis que le Prophète de l'Islam a dit: Aucune oeuvre que vous faites ne vous assure le ciel, ne vous préserve de l'enfer - pas même moi, sans la grâce de Dieu."
De ces Hadiths, j'ai conclu que personne ne peut obtenir le salut si la miséricorde de Dieu n'est avec lui. Cela m'a consolé en partie, mais je me suis tout de même dit: "Si Dieu est plein de miséricorde, il est également juste aussi. Si Dieu pardonne par sa miséricorde seulement, les exigences de sa justice et de sa justification sont écartées. Cela manifesterait alors une défaillance dans l'être de Dieu. Une telle chose serait indigne de la gloire de Dieu."
Le troisième point que j'ai découvert dans les Hadiths a été que même le Prophète de l'Islam ne peut sauver quelqu'un, pas même sa fille Fatimah, ni ses parents. Ainsi, l'idée que le Prophète peut intercéder en faveur des fidèles - ce que je croyais - était erronée.
Un Hadith dit:
"Abu Huraira a transmis que lorsque le verset: "Pousse tes proches à avoir crainte" a été révélé au Prophète de l'Islam, celui-ci s'est levé et a commencé à déclarer: O peuple de Qur, et vous, fils d'Abdul Manaf, et vous Abbas, fils d'Abdul Muttalib, et vous Safiyyah, ma tante, je ne puis vous sauver du châtiment au jour de la résurrection. Veille sur toi, ma fille Fatimah. Tu peux te servir de mes biens, mais je ne puis te sauver du jugement de Dieu. Veille sur toi" (Bukhari).
Ainsi, après une étude poussée des Hadiths, je ne pouvais aller plus loin. Dans la crainte et le désespoir, j'ai fermé les livres des Hadiths et j'ai prié Dieu: O Dieu mon Créateur et Seigneur, toi qui connais les secrets de mon coeur mieux que moi-même, tu sais depuis quand je recherche la vraie religion. J'ai poussé mon investigation aux limites de mes possibilités. Maintenant, ouvre-moi la porte de ta connaissance et de ton salut. Permets que j'entre dans la compagnie de ton peuple, de ceux qui te sont agréables afin de pouvoir pénétrer dans ta présence, dans la gloire et la joie. Amen."
Dans cet état d'esprit désespéré, j'ai recommencé à lire le Saint Injil, (le Nouveau Testament) avec l'idée de corriger toute erreur d'investigation. En ouvrant le livre, cette fois, mes yeux sont tombés sur ces paroles: "Venez à moi, vous tous qui êtes fatigués et chargés, et je vous donnerai du repos" (Matthieu 11.28).
Je ne saurais dire comment ce passage du Nouveau Testament s'est révélé à moi. Je ne le cherchais pas. D'autre part, ce n'était pas le hasard. C'était la réponse de Dieu à mon investigation. Pour un pécheur tel que moi, c'était vraiment la proclamation suprême de la Bonne Nouvelle. Ce verset a eu sur moi un effet extraordinaire. Il m'a procuré la paix, la consolation et la joie. Il a fait disparaître en moi toute incertitude, toute crainte. Le Messie déclare:
"Je vous donnerai du repos." Il montre comment le salut dépend de lui. Il ne souligne pas simplement un chemin au-dessus ou au-delà de lui. Mais il dit:
"Je suis le chemin, la vérité et la vie. Nul ne vient au Père que par moi" (Jean 14.6).
Je me suis demandé alors si je pouvais avoir confiance dans cette extraordinaire déclaration de Christ. J'ai conclu qu'on pouvait s'y fier car, tout d'abord, Christ est accepté par les musulmans comme sans péché, glorieux dans ce monde et dans l'au-delà, comme la Parole de Dieu et l'Esprit de Dieu. Ces qualifications et d'autres encore sur Jésus indiquent sa perfection. Ensuite, selon les chrétiens, il est le Dieu parfait et l'homme parfait, dépourvu de toute passion et d'ambitions humaines. Ainsi, il est impossible que le Christ qui, selon les musulmans et les chrétiens, possède les plus nobles qualités, commette un péché et fasse quelque chose indigne de lui.
J'ai commencé alors à réfléchir sur les promesses de Christ de me donner le salut. Pour calmer mon esprit, j'ai cherché dans le Saint Injil (le Nouveau Testament), et j'ai trouvé ce verset:
" C'est ainsi que le Fils de l'homme est venu non pour être servi mais pour servir et donner sa vie comme la rançon de plusieurs"(Matthieu 20.28).
En lisant ce verset, j'ai découvert comment Dieu offre le salut. Christ a donné sa vie pour nous pécheurs. C'est un merveilleux moyen auquel le monde n'offre aucune contrepartie. Des multitudes de gens ont fondé des religions dans ce monde, mais aucun d'eux n'a déclaré que sa mort servirait au pardon des péchés. Seul Christ a fait cela, et plus encore, il l'a accompli.
Je suis alors tombé en extase. L'image de Christ et son amour pour les hommes ont fait une impression indélébile sur mon coeur. Mais, je me suis pourtant interrogé: "Pourquoi Jésus a-t-il dû se sacrifier sur la croix? N'aurait-il pas pu apporter le salut sans donner sa vie?" En poussant plus loin ma réflexion, j'ai trouvé aussi la réponse: Dieu est à la fois plein de miséricorde et de justice. Si Christ avait promis le salut sans donner sa vie, les exigences de la miséricorde auraient été remplies. Pour satisfaire aux exigences de la justice, Christ devait payer la rançon, en donnant son sang précieux. C'est ainsi que Dieu a manifesté son amour envers nous.
"Mais Dieu prouve son amour envers nous en ce que lorsque nous étions encore des pécheurs, Christ est mort pour nous"(Romains 5.8).
Bref, j'ai poursuivi mes investigations dans le Nouveau Testament en le lisant plusieurs fois d'un bout à l'autre. J'ai trouvé ainsi des centaines de versets et maintes paraboles, qui me prouvaient, sans l'ombre d'un doute, que le salut (le coeur même et le but de toute la religion) ne peut s'obtenir que par la foi dans le Seigneur Jésus-Christ. Je ne citerai ici qu'un passage:
"Nous savons que tout ce que dit la loi, elle le dit à ceux qui sont sous la loi, afin que toute bouche soit fermée, et que tout le monde soit reconnu coupable devant Dieu. Car nul ne sera justifié devant lui par les oeuvres de la loi puisque c'est par la loi que vient la connaissance du péché. Mais maintenant, sans la loi est manifestée la justice de Dieu à laquelle rendent témoignage la loi et les prophètes, justice de Dieu par la foi en Jésus-Christ pour tous ceux qui croient. Il n'y a point de distinction, car tous ont péché et sont privés de la gloire de Dieu, et ils sont gratuitement justifiés par sa grâce, par le moyen de la rédemption qui est en Jésus-Christ. C'est lui que Dieu a destiné par son sang, à être pour ceux qui croiraient victime propitiatoire afin de montrer sa justice, parce qu'il avait laissé impunis les péchés commis auparavant, au temps de sa patience"(Romains 3.19-25).
MA DÉCISION ET MA CONFESSION
C'est ainsi qu'après avoir terminé mes investigations, je suis arrivé à la conclusion que je devais devenir chrétien. Dans de telles circonstances, il m'a semblé honorable de présenter ma situation à la société dont j'étais toujours président, pour que mes amis aient connaissance de ma recherche et que je sois libéré de toute accusation de poursuivre des recherches en secret.
Je me suis rendu à la réunion, comme d'habitude. Munshi Mansur Masîh était prêt à parler. C'est alors que j'ai interrompu le cours normal de la réunion en déclarant que cette fois, ce serait moi qui mettrai l'Islam en cause. J'ai donc décrit les résultats de mes années de recherche. Les responsables de la société étaient stupéfaits de m'entendre, mais ils se sont consolés dans l'espoir que j'allais apporter la controverse à mes propres déclarations. Après avoir terminé, je me suis assis. Le vice-président a dit: "On espère que le président lui-même réfutera son adresse défavorable."
Mais je me suis levé en disant: "Écoutez mes amis. Ce que je viens d'expliquer n'est pas quelque chose de superficiel ou d'imaginé pour la circonstance. Ce sont mes convictions profondes et décisives, fondées sur des années d'investigation. Pour être plus précis, cela a commencé le jour où Munshi Mansur Masih nous a parlé du salut. A ce moment-là, j'ai promis à Dieu de lire la Sainte Bible, non pas comme je l'avais fait jusque là ou auparavant, mais en cherchant la vérité, afin que le chemin de la vérité et de la justification me soit révélé. Ainsi, en mettant de côté tout préjugé et toute querelle philosophique, j'ai comparé la Bible et le Coran. Je suis arrivé à la conclusion que le salut ne se trouve qu'en Jésus-Christ. C'est tout ce que j'ai à dire. S'il s'est glissé quelque déformation ou défaut dans mon étude, je serai reconnaissant que vous me le montriez. D'autre part, si vous désirez que je réfute ces arguments, je vous dirai franchement que je ne puis y répondre. Personne d'autre ne pourra apporter de réponse."
J'ai quitté la salle, car il était imprudent que je reste. Munshi Mansur Masih m'a tout de suite suivi. Il a jeté ses bras autour de mon cou en pleurant de joie, et en murmurant d'une voix tremblante:
"Venez chez moi ce soir. Il n'est pas prudent que vous restiez seul dans votre chambre." J'ai répondu que les responsables de mon organisation étaient des hommes intelligents, et que je n'avais rien à craindre d'eux."Bien sûr," ai-je ajouté,"il y en a d'autres dont je pourrais avoir peur. Je viendrai avant l'aube. Si vous ne me voyez pas à ce moment, venez me rejoindre chez moi."
Nous nous sommes séparés. Je me suis enfermé dans ma chambre, et j'ai éteint la lumière. Je me suis assis, plongé dans mes pensées. Je n'oublierai jamais les idées qui ont traversé mon esprit, et mes luttes spirituelles, pendant toute la nuit, une nuit de décision, de terrible mise à l'épreuve. A certains moments, je me suis dit que si je devenais chrétien, j'allais perdre mon pays, mon héritage, mes droits, ma famille, mes amis - en quelque sorte, tout. J'ai été aussi troublé par l'idée que devenir chrétien voulait dire entrer dans un monde où les pratiques et les habitudes différaient totalement de ce que j'avais vécu jusqu'alors. Je n'ai pas pu dormir cette nuit-là.
Enfin, je me suis dit: Sultan, réfléchis, tu es l'enfant d'une heure, d'un monde qui passe. Quand tu mourras, ton pays, ton héritage ne te seront d'aucun secours, ni ta famille, ni tes amis. Tout cela appartient à ce monde. Seule ta foi va au-delà de la tombe. Aussi, il n'est donc pas sage d'oublier la vie éternelle et le bonheur spirituel au profit de cette vie transitoire. Je me suis mis à genoux devant Dieu, et j'ai prié: "O Dieu éternel et omnipotent, toi qui sondes tous les coeurs, je veux m'attacher à toi. Accepte cette offrande, protège-moi de toutes les ruses de Satan et des dangers spirituels. Enlève de mon coeur la mondanité et ses désirs. Donne-moi le courage et la force, afin que je puisse confesser ton Fils unique Jésus-Christ, devant tous les hommes. Entends et accepte ma prière à cause de Jésus-Christ. Amen."
Après cela, je me suis assoupi un bref instant. En me réveillant, j'étais heureux et dans la joie sans aucune ombre d'angoisse ni de crainte.
Le jour se levait. J'ai fait ma toilette pour me rendre chez Munshi Mansur Masih. En arrivant chez lui, je me suis rendu compte combien il avait eu du souci pour moi. Il savait que j'avais l'habitude de prendre le thé, et avait tout préparé. Après cela, nous avons parlé un moment, puis nous avons prié ensemble. Ensuite, nous nous sommes rendus chez le Pasteur Ledgeard.
Le Pasteur a été surpris d'une visite aussi matinale. Munshi Mansur Masih lui a dit que j'étais venu pour être baptisé. Il a commencé par croire que nous ne parlions pas sérieusement. Mais en apprenant ce qui s'était passé la veille, il s'est levé immédiatement, et a dit en m'embrassant: " Je savais que si vous lisiez la Bible sérieusement, vous deviendriez chrétien. Que Dieu soit béni, vous avez été convaincu."J'ai été baptisé le 6 août 1903 dans l'Église St. Paul de Bombay. Tout de suite après la cérémonie, j'ai été envoyé à Kanpur, car il était dangereux de rester à Bombay.
Un merveilleux changement a eu lieu lorsque j'ai reçu Jésus-Christ. Mes paroles, mes actions, toute ma manière de vivre ont été transformées au point qu'un an plus tard, quand je me suis rendu à Bombay pour une visite, mes amis musulmans n'en revenaient pas. Ils ont été émerveillés de ma douceur, car ils savaient combien je me mettais facilement en colère.
Avant de recevoir Jésus-Christ, je reconnaissais le péché. Mais je ne comprenais pas, comme je le fais maintenant, la force dangereuse et destructive qu'il a. Je suis toujours un homme plein de faiblesse, une poignée de poussière, mais quand j'ai péché, je ne peux décrire le honte et le regret qui me remplissent. Je me prosterne jusqu'à terre dans les larmes pour me repentir et demander le pardon. Cette attitude n'est possible qu'en reconnaissant le sacrifice du Seigneur Jésus-Christ. Le péché ne peut disparaître par la repentance seulement. Il doit être purifié par le sang de notre Sauveur. C'est pour cette raison que le monde qui prend le péché à la légère court à sa perte.
Bien que Satan m'attaque de toutes ses forces, je ne suis pas troublé, parce que je crois que Christ lui a brisé la tête. Il ne peut faire du mal aux serviteurs fidèles, car Christ l'a vaincu. Il ne peut rien contre eux. Que Dieu, le Créateur du ciel et de la terre, celui qui sonde les coeurs, transforme le coeur de mes frères musulmans comme il a transformé le mien, et leur donne la vision, afin que, en pensant au jour du jugement, ils comprennent leur profond besoin spirituel et viennent au Seigneur Jésus-Christ.
Croyez, mes chers frères musulmans, que je suis celui qui vous souhaite tout le bien spirituel.