La grâce de céder
Chapitre 6. SI LE GRAIN DE BLE...
La plupart des prédicateurs sont trop occupés. Je suis occupé, mais pas trop. Saviez-vous que ce n'est pas spirituel d'être trop occupé? Cela peut impressionner les gens, mais ce n'est pas spirituel. Dieu a fait de vous une seule personne, et vous ne pourrez jamais faire le travail de deux personnes de façon satisfaisante, même si vous y mettez tous vos efforts.
J'ai lu un petit article de Jamie Buckingham, dans le bulletin de son église, concernant sa décision de renoncer à faire les choses "urgentes", afin de faire les choses «importantes». La plupart des prédicateurs sont tellement submergés par les choses urgentes, qu'ils n'arrivent jamais à faire celles qui sont importantes. Une des prières les plus nécessaires dans la Bible se trouvedans le Psaume 90: "Enseigne-nous à bien compter nos jours, afin que nous appliquions notre coeur à la sagesse". "Enseigne-moi comment utiliser mon temps". C'est là une des choses qui m'impressionne le plus au sujet de Jésus. Il n'était jamais agité, jamais pressé, jamais trop occupé. En fait, c'est une extension de mon ego si je me rends indispensable. La plupart des gens ne veulent pas vraiment qu'on puisse se passer d'eux. En ce qui me concerne, mon plus grand triomphe est lorsque l'on peut se passer de moi. Alors, c'est une réussite.
Je vais vous raconter une petite histoire, et ensuite nous terminerons. C'est une histoire vraie. Elle est tellement personnelle que je dois faire attention. Mais les effets continuent de se faire sentir dans ma vie. En juin 1971, je suis allé à Seattle, Washington, pour prendre part à un genre de retraite fraternelle pour serviteurs de Dieu. Don Basham, Bob Mumford, Charles Simpson, Larry Christenson, Ralph Wilkerson, David Duplessis, Dennis Bennett, Ern Baxter, et beaucoup d'autres enseignants charismatiques de renommée nationale étaient là. Cela dura environ cinq jours. Chaque matin et la plupart des après-midi, nous étions réunis en communion fraternelle, et ce fut vraiment une belle expérience. Nous avons passé un jour et demi à parler des démons, et deux jours du baptême d'eau. Quand vous avez passé ces deux obstacles, vous avez fait des progrès! Mais réunir tant d'enseignants dans ce coin éloigné du nord-ouest des Etats-Unis revenait très cher, et il n'y avait pas de finances pour y pourvoir. Donc, les organisateurs de la conférence dirent: "Frères, nous ne vous promettons rien, mais nous essaierons de trouver l'argent pour vos billets". Dans ce but, ils organisèrent des réunions publiques chaque soir de la semaine dans cinq endroits stratégiques de Seattle et sa périphérie. Et ils "lâchèrent" deux ou trois prédicateurs tous les soirs à chaque endroit. Eh bien, chacun de ces endroits était plein à craquer, avant même que la réunion ne commence! Et la réaction du public était formidable.
Lorsque la retraite fut terminée, je restai à Seattle pour prêcher dans une des églises des Assemblées de Dieu pendant le week-end. J'eus ainsi l'occasion d'entendre les serviteurs de Dieu locaux parler des réunions. Comme j'avais été auparavant pasteur d'une église à Seattle, j'en connaissais beaucoup, et je savais qu'ils exprimaient leur opinion réelle.
En substance, leurs commentaires se résumèrent à ceci: "A notre souvenir, aucune réunion n'a jamais eu un tel impact sur la ville de Seattle que ces réunions-là". Le plus drôle au sujet de ces réunions était qu'elles n'étaient pas organisées pour produire un impact sur la ville de Seattle, mais pour payer les billets d'avion des prédicateurs. Voilà la vérité!
Le lundi matin, je me trouvais dans l'avion en direction d'Atlanta, où devaient avoir lieu mes prochaines réunions. L'avion est un des meilleurs endroits pour méditer. Le téléphone ne peut pas vous atteindre, les gens ne vous dérangent pas, vous vous mettez à l'aise dans votre siège, seul avec vos pensées. Alors que j'étais assis là, je me dis en moi-même: "N'est-ce pas étrange? Des réunions, qui n'étaient pas destinées à produire un impact sur une ville, en ont produit un plus grand que des réunions qui étaient organisées dans ce but". A ce moment-là, le Seigneur commença à me parler très clairement; non pas audiblement, mais doucement et de façon très précise, et voici ce qu'il me dit: "Dis-moi un peu, avec qui ai-je eu plus de problèmes: avec Jonas ou avec la ville de Ninive?" Je réfléchis un instant, et je répondis: "Seigneur, lorsque tu as corrigé Jonas, tu n'as plus eu de problèmes avec Ninive". Et il dit: "Quand les prédicateurs acceptent que je les redresse, je n'ai pas de problèmes avec les gens"!
Je peux raconter cette histoire, parce que je suis moi-même prédicateur. Le Seigneur n'avait pas dit: "quand les autres prédicateurs acceptent que je les redresse..." mais "quand les prédicateurs acceptent que je les redresse..." J'étais inclus dans le nombre, et je le réalisais.
Après mon arrivée à Atlanta, le Seigneur continua de me travailler à ce sujet. Mes réunions dans cette ville se tenaient dans un hôtel. Entre-deux, je me reposais sur un lit dans l'une des chambres, et mes pensées étaient plus ou moins vides. Je trouve que, lorsque nos pensées ne sont pas trop actives, Dieu peut plus facilement attirer notre attention. Alors que j'étais couché là, dans cet état, une série de mots vint à mon esprit - beaucoup d'entre eux étaient des noms de lieux. Ils étaient aussi clairs et vivants que s'ils avaient été imprimés sur du papier devant mes yeux. C'étaient les mots suivants: "De Kerith à Sarepta; de Sarepta au Carmel; du Carmel à Horeb et d'Horeb dans beaucoup de vies". Je connaissais suffisamment la Bible pour reconnaître que ces mots étaient un résumé de la carrière d'Elie, et que les noms de lieux représentaient des étapes successives de son ministère: de Kérith à Sarepta, puis au Carmel et à Horeb.
Alors, je commençai à remplir les détails dans mon esprit, et je vis très clairement que le point culminant du ministère public d'Elie était sur le mont Carmel. Ce fut là qu'il rassembla tout Israël, qu'il défia huit cent cinquante faux prophètes, qu'il fit descendre le feu du ciel, et qu'il vit tout le peuple d'Israël prosterné la face contre terre et criant: «C'est l'Eternel qui est Dieu». Si un homme a jamais eu un triomphe personnel et individuel, c'était bien Elie sur le mont Carmel.
Mais ensuite, le Seigneur me montra que, quelques jours plus tard, Elie s'enfuyait loin de Jézabel, une femme qui était une sorcière, et demandait à Dieu de lui ôter la vie. Comme il fut court et momentané, ce triomphe du Carmel! Puis, j'eus la pensée suivante: si Dieu avait répondu à la demande d'Elie et avait enlevé sa vie à ce moment-là, il serait mort sans avoir terminé sa tâche et sans successeur spirituel. Il n'y aurait eu personne pour continuer et compléter son oeuvre. Mais, lorsqu'il arriva finalement à Horeb et rencontra Dieu face à face, il prit connaissance de son plan, qui était très différent du sien.
Dieu dit: «Elie, qu'est-ce que tu fais ici?» Il répondit: «J'ai été rempli de jalousie pour l'Eternel...», et il continua en donnant une liste de toutes ses activités et de ses exploits. Le Seigneur lui répondit en quelques mots: «Je sais tout cela, Elie, mais qu'est-ce que tu fais ici?» Et lorsque Elie eut fini de dire au Seigneur tout ce qu'il avait fait, le Seigneur dit à Elie ce qu'il voulait qu'il fasse ensuite. Il dit: «Je veux que tu oignes trois hommes: Elisée, pour être prophète à ta place, Hazael, pour être roi de Syrie, et Jehu, pour être roi d'Israël.» Si vous lisez les chapitres suivants dans le livre des Rois, vous verrez que ces trois hommes, cités par Dieu dans cette entrevue sur le mont Horeb, finirent chacune des tâches que Dieu avait assignées à Elie. Finalement, il n'y avait rien qui ne fut achevé. Elie ne pouvait pas finir le travail lui-même, mais il pouvait trouver ses successeurs et leur transmettre la tâche.
A mesure que ces choses passaient dans mon esprit, je me rendais compte que Dieu me parlait d'une façon très directe. Il me montrait que j'avais deux possibilités devant moi: je pouvais continuer à faire mon travail, à poursuivre mon ministère en utilisant la foi et la puissance que Dieu m'avait données dans la mesure de mes capacités, et je pouvais remporter un triomphe personnel à un certain niveau. Mais je finirais sans successeur, et il n'y aurait pas de fruit permanent à mon ministère. Puis, Dieu me montra l'autre possibilité: ne sois pas ambitieux pour toi-même, n'essaie pas de promouvoir ton propre ministère, n'en fais pas ta propre affaire, investis dans la vie d'autres personnes. Laisse-les avoir les honneurs, laisse-les prendre la relève là où tu dois t'arrêter. Laisse-les avoir plus de succès que toi.
J'ai toujours été, d'une certaine façon, quelqu'un qui a réussi. Je ne dis pas cela pour me vanter, mais à l'âge de douze ans j'étais le premier de la classe; plus tard, j'étais capitaine de l'école, le plus jeune enseignant à l'université, et ainsi de suite. C'est enraciné dans ma pensée que de m'attendre à avoir du succès. Mais Dieu m'a montré qu'il y a encore un niveau de succès supérieur. Laisse ce petit grain de blé que tu tiens dans ta main tomber en terre et mourir, et Dieu se chargera des conséquences.
Ainsi, je peux vous dire maintenant que je suis une personne très libre, parce que j'ai tout lâché et tout abandonné entre les mains de Dieu. Peu importe si je ne chasse plus jamais de démons. Si Dieu ne veut plus que je le fasse, cela ne me dérange absolument pas. Peu importe si je ne dirige plus de séminaires et si je n'écris plus jamais un seul livre. Si Dieu me conduit à disparaître de la scène publique, ce sera très bien pour moi; pourvu que j'investisse là où cela fera du bien. Je ne sais même pas combien j'ai à communiquer; je n'ai pas à le savoir. Mais ce que j'ai, je suis disposé à le donner, je suis disposé à le laisser tomber en terre. Par conséquent, je suis un homme très heureux. Je suis réellement libre. Je sais ce que c'est que d'agir comme si on était libre, je sais ce que c'est que de prêcher la liberté; mais la meilleure chose est d'être libre. Et ici, je peux dire en toute sincérité devant Dieu: «Je suis libre!»
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